
On voit fleurir depuis quelques temps sur internet, mais aussi lors d’événements ou dans quelques lieux touristiques, des drapeaux dits « de Gascogne ». Le débat autour d’un drapeau pour la Gascogne avait été lancé il y a un moment par l’administrateur du site gasconha.com, Tederic Merger. L’idée me semble intéressante, même bonne, car tout en considérant la Gascogne comme part intégrante de l’Occitanie, je considère que le soutien à l’identité gasconne est tout aussi important afin de favoriser la conscientisation de la population à l’importance de la défense de notre langue minorisée. C’est en effet par l’adhésion du peuple – adhésion qui passe par l’accord avec ses représentations – que l’on pourra avoir l’impact le plus puissant. Or chez nous, l’identité gasconne est encore et toujours forte et admise par tous. Un drapeau peut donc être un bon symbole. À condition qu’il évoque, aux yeux de la population, cette même culture. Le drapeau le plus répandu actuellement, au-delà du fait qu’il n’est historiquement que le blason de la généralité d’Auch et qu’il n’est pas connu largement par les Gascons, ne me paraît pas jouer – ni pouvoir jouer – ce rôle, ni dans la forme, ni dans le fond.
J’ose donc, humblement, proposer moi-aussi, un drapeau, qui puisse évoquer au mieux notre culture et notre identité, ainsi que la nécessaire lutte à mener dans l’espoir d’une Renaissance et d’une Résistance populaire. La méthode que j’ai suivie peut être considérée comme une quête dans les profondeurs de mon inconscient – collectif ? - de Gascon. Voici la démarche, et la conclusion que j’en tire.
Les couleurs d’abord. Celles qui semblent largement admises comme gasconnes sont le blanc et le rouge (sur ce point, la majorité semble d’accord) : couleurs de nombreuses villes gasconnes : Auch, Tarbes, Dax, Bayonne, etc... mais aussi des fameuses férias. Il sera nécessaire qu’elles apparaissent. J’ai ainsi pensé à neuf bandes, rouge et blanche, évoquant les neuf peuples de la Novempopulanie, ancêtres de la Gascogne. On pourrait s’arrêter ici, et nous aurions déjà un symbole tout à fait convaincant, gascon par ses couleurs, et ancré dans une réalité historique ancienne. Un véritable drapeau dans sa forme.
Pourtant, il m’a semblé que l’on pouvait aller un peu plus loin. Lors de leur réflexion, les membres de gasconha.com ont pensé à évoquer la forme triangulaire de la Gascogne. Idée intéressante, mais la proposition finale me semble peu heureuse pour un drapeau. Dit de façon un peu rapide, ça manque un peu de nhac, de lyrisme ! En reprenant l’idée du triangle, on pourrait tout aussi bien imiter les nombreux autres drapeaux qui utilisent ce symbole : en le tournant légèrement (cela ne change rien, la Terre est ronde, n’est-ce pas ?), on obtient quelque chose proche d’un véritable étendard. Le triangle peut ainsi y signifier la lutte, l’engagement pour que vive la langue et la culture (à l’image du drapeau palestinien, cubain ou catalan indépendantiste, par exemple). La couleur verte évoque la nature de notre pays : des Landes de Gascogne aux coteaux d’Armagnac, des vignobles bordelais aux Pyrénées. De plus, l’association du rouge, du blanc et du vert, fait écho aux couleurs basques, culture voisine et dont nous partageons les origines (cf Vasconie).
Enfin, j’ajoute dans ce triangle une étoile jaune pour signifier l’Estela du Félibrige et rappeler ainsi les liens culturels, artistiques (notamment littéraires) et linguistiques avec le reste de l’Occitanie, ainsi que le « só », le soleil du célèbre hymne à la Gascogne de Miquèu de Camelat, mais aussi l’ouverture sur l’universalité : des langues, des cultures et des peuples unis sous le même soleil. Une Gascogne résolument tournée vers un avenir lumineux, combatif et plein d’espoir.
« Lhèva xens vergonha lo cap au matin
Lo ton só Gasconha lèu que va sortir »
Miquèu de Camelat