Antériorité du gascon sur l’occitan LAFITTEJann [Forum Yahoo GVasconha-doman 2006-10-04 n° 7187]

- Jean Lafitte

Loïc pose la question suivante :

> a-t-on oui ou non des attestations comme quoi le gascon existait
> avant que l'occitan n'apparaisse ? Si oui, alors le gascon est une langue
> distincte, et c'est tout. S'il y a de vraies preuves, je me demande pourquoi
> il y a encore un débat...

Réponse : oui, exposées dans une « note » magistrale de Jean-Pierre Chambon
et de Yan Greub « Note sur l¹âge du (proto)gascon » (Revue de linguistique
romane, n° 263-264, Juillet-Décembre 2002, pp. 473-495).
Jean-Pierre Chambon est prof. à la Sorbonne où il est le Directeur du Centre
d'études et de Recherches d'Oc "CEROc" et Yan Greub est chercheur au Centre
du FEW de Nancy. Je l'ai résumée dans le Ligam-DiGaM n° 20 d'Octobre 2002.
Ce sujet à fait l'objet d'une communication de Jean-Pierre Chambon et Yan
Greub au VIIIe congrès de l'A.I.E.O. (Asso. internationale d’Études
Occitanes) de Bordeaux en Septembre 2005, sans faire l’objet d’aucune
contestation de la part des nombreux et éminents linguistes de l’assistance.
Dont Pierre Bec qui a rappelé qu’il l’avait dit depuis longtemps. c’est vrai
(par rapport à l’occitan, le gascon estune langue très proche, certes, mais
spécifique, et cela depuis les o-rigines, au moins autant que le catalan ;
Manuel pratique d’occitan moderne, p. 26). Mais il ne l’avait pas prouvé.

Or Chambon et Greub montrent que les traits spécifiques du gascon sont tous
attestés avant l’an 600, date à laquelle les parlers qu’on réunirait plus
tard sous le npme d’ » opccitan » n’avaient pas encore émergé du latin parlé
tardif, un seul trait qui leur soit commun n’étant alors manifesté, le
passage de tr à yr (patrem > payre).

Voici les conclusions de cette note :

 » 7.2. Il en résulte que l’individuation du gascon-par-définition était
entièrement acquise ca 600 au plus tard et que le début de ce processus
remonte au moins à la période wisigotique (ca 5e siècle). [Š]

 » 7.3. On trouve dans la littérature tout un arsenal de formules pour
décrire la situation du gascon. [citations de linguistes sur la relation
gascon-occitan].

 » 7.4. Du point de vue de la linguistique génétique que nous avons adopté
ici, nous rejoignons l’opinion de Luchaire, de Baldinger et de Straka : il
paraît clair que le gascon, hautement spécifié ca 600 au plus tard, ne peut
être considéré comme un "idiome détaché du provençal" ou comme une
"variété/forme" ou encore comme un "dialecte/groupe de parlers" de
l’occitan. En effet, "si l’on cherche des innovations qui soient propres à
tout le domaine occitan, on ne trouve que des changements relativement
insignifiants" (Wüest 1979, 369). À la date où le gascon est
linguistiquement individualisé, l’occitan ne pourrait se définir
génétiquement que par une seule innovation ancienne à la fois commune à tout
son espace et spécifique, à savoir l’évolution en [jr-] des groupes -TR-,
-DR primaires ou secondaires [Š] Car il y a tout lieu de renoncer à définir
génétiquement l’occitan par un seul changement mineur, comme la langue
romane qui dit peira. Par voie de conséquence, l’occitan (ou
"romano-occitan" selon la pittoresque expression de Ravier) n’a jamais
émergé. On peut penser qu’il a plutôt convergé, d’abord de manière
négative-passive (cf. Chambon/Olivier 2000, 104-5).
 » 7.5. En résumé, le gascon n’a pu se détacher d’un ensemble linguistique
qui n’existait pas ‹ ou, si l’on préfère, qui n’existait pas encore ‹ au
moment où il était lui-même constitué. Il ne peut par conséquent être
considéré comme un dialecte ou une variété d’occitan au sens génétique de
ces termes (« forme idiomatique évoluée de »). Du point de vue génétique, le
(proto)gascon est à définir comme une langue romane autonome. On pourrait
dire, en s’inspirant de la formule de Tagliavini (1969, 423), que cette
langue s’est coordonnée ensuite, sociolinguistiquement et, dans une certaine
mesure, linguistiquement, au provençal. »

Hèt beroy.

J.L.

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