Gascon « socialisé » lafitte.yan [Forum Yahoo GVasconha-doman 2008-12-06 n° 9157]

- Jean Lafitte

Adixat moundë,

Très pris par un travail de longue haleine, j'ai réagi comme Daniel Séré
en lisant ces mots de Didier :

>A txatti :
>entenut...que prométi de comença a "socialisa" lo meinh gascon en escriven tostem "hemna".



Par son message, il m'évite de passer du temps a dire la même chose :

Adishatz monde,

Didier fait comme il veut, mais je ne vois pas pour quelle raison il
devrait "socialiser" son gascon chalossais en écrivant "hemna" à la
place de "hembla" qui se dit aussi en Béarn dans la région de Salies.
Pas davantage que Bruno/Txatti n'aurait à faire de même avec son gascon
couseranais en écrivant "lo, la, los, las" à la place de "eth, era, es".
Quand on a la chance d'avoir une bonne connaissance d'un parler gascon
local, la meilleure façon de le socialiser c'est d'en respecter les
formes qui sont les siennes. A moins de tenter de "socialiser" un gascon
normé, standard qui reste à inventer sous une forme centro-méridionale
et non pas sous la forme "light" conçue par des occitanistes qui se
cassent la tête pour rien alors qu'en l'occurrence ils ont un
"prêt-à-porter" hyper-light avec le (mi-)gascon des marges garonnaises.
Mais là nous nous heurterions aux mêmes écueils que les félibres
lorsqu'ils ont caressé un temps l'espoir de faire de la langue
littéraire de Mistral à base de provençal rhodanien la langue de tout le
Midi des Alpes aux Pyrénées ou les occitanistes qui rêvèrent dans les
annés 70 du siècle dernier, et dont certains rêvent toujours, d'un
occitan dit "référentiel" à base de languedocien central. Adopter un
gascon proche de l'hypothétique norme centro-méridionale est acceptable
lorsqu'on n'a aucune raison de passer par un gascon local, à plus forte
raison si l'on ne possède pas la moindre base du moindre parler local,
d'où l'intérêt pédagogique d'un tel gascon proto-normé. Par contre
lorsqu'on possède de bonnes bases dans un parler local, il n'y a aucune
raison de "corriger" ou de "socialiser" son gascon en le farcissant de
formes centrales et méridionales même si selon certains témoignages les
jeunes s'approprieraient un tel langage mixte d'une façon ludique.

Hètz beròi.
DFS


Un seul bémol, qui va scandaliser quelques uns, mais tant pis, à se
cogner la tête contre les murs, ce ne sont pas les murs qui se fissurent.

Or c'est la forme béarnaise qui a une littérature et des milliers de
lignes d'écrits anciens publiées, donc accessibles, donc si l'on doit
enseigner un gascon « proto-normé » à ceux qui n'ont aucune raison
d'apprendre une forme locale, ce ne peut être que le béarnais. Michel
Grosclaude l'avait bien compris avec Lo Gascon lèu e plan, et aussi
Pierre Bec dans sa préface de cet ouvrage. Et il y a des manuels pour
apprendre le béarnais ; pour les autres formes du gascon, c'est bien plus
difficile.

Hèt beroy.

J.L.

Grans de sau

  • Adishatz,
    Eh bien non, je ne suis pas tout à fait d'accord.
    Je pense qu'il est effectivement sain et important d'encourager
    l'usage des parlers locaux dans l'expression orale, mais je pense
    que pour l'écrit il faut absolument disposer d'un gascon unifié en
    PLUS des dialectes et parlers. Que l'on écrive en dialecte ou en
    gascon naturel, pourquoi pas, personne n'ira en prison pour ça, bien
    au contraire, il faut encourager l'usage des parlers gascons, mais
    il importe qu'il y ait une langue gasconne raisonablement unifiée
    pour un usage pan-gascon. Ce pourrait être le béarnais de l'arribèra
    deu gave de Pau, effectivement ou alors un gascon synthétique
    fusionant plusieurs dialectes sur le modèle du Batu basque. C'est
    tout de même cette seconde solution qui a été choisie par Pierre Bec
    pour son oeuvre en gascon et le résultat ne pose aucun de problème
    de compréhension. L'avantage de cette dernière solution c'est qu'il
    place tous les locuteurs sur le même pied d'égalité, qu'ils soient
    du Béarn ou pas. L'exemple du batu basque pour le basque est à
    étudier de près. Rien n'empèche un basque d'écrire des poèmes, des
    chansons et des récits en bizkaien ou en souletin, par exemple, mais
    la langue basque, c'est le batu, la langue artificielle,
    synthétique, compositionelle. Ce dont nous avons besoin, c'est un
    batu gascon. Je ne vois pas pourquoi ce que les basques ont réussi à
    faire pour le basque, une langue unifiée acceptée partout, on ne
    pourrait pas le faire pour le gascon. Il serait temps.

  • Adishatz,

    Bien sûr qu'il faudrait une langue pan-gasconne raisonnablement unifiée.
    Qui a dit le contraire ? Aussi, je ne saisis pas trop sur quoi, Gérard,
    vous n'êtes pas d'accord. Seulement il ne faut pas trop rêver en prenant
    l'exemple basque. D'une part, les dialectes basques sont beaucoup plus
    différenciés entre eux que ne le sont les dialectes gascons, à tel point
    qu'aux deux extrémités du continuum basque le souletin et le biscaïen
    pourraient passer pour deux langues parentes mais autonomes entre
    lesquelles l'intercompréhension est gravement affectée pour ne pas dire
    problématique. D'une autre part, un très fort sentiment d'appartenance à
    un seul et même peuple basque a puissamment favorisé la création, puis
    l'acceptation d'une forme moyenne écrite, parlée et enseignée de basque
    unifié, le batua. Rien de tel en Gascogne. Bien qu'entre nord-gascon et
    gascon pyrénéen les différences lexicales, phonétiques et grammaticales
    (les conjugaisons par exemple) soient assez poussées pour gêner
    l'intercompréhension immédiate, il n'y a rien de comparable avec le
    basque "naturel", "dialectal", qui constitue une macro-langue, un
    ensemble qui relève à la fois du groupe dialectal et du groupe
    linguistique à l'image de l'ensemble roman tout entier. A la différence
    que si dans ce dernier de nombreuses langues ont été crées par
    élaboration, dans l'ensemble-continuum basque une seule a émergé sous
    une forme unifiée, élaborée, sentiment d'appartenance unitaire oblige.
    Comme je le rappelais dernièrement, en Béarn par exemple quasiment
    personne ne se dit ou ne se veut gascon, quelques-uns occitans, beaucoup
    béarnais et presque tout le monde français, point. Ailleurs, le
    sentiment gascon est à peine plus brillant. Alors, le béarnais,
    prototype d'un gascon "batua", ce n'est pas pour demain... Ce n'est pas
    parmi une telle misère sociologique et identitaire qu'on peut rêver
    confortablement d'une langue gasconne qui ferait "rampèu" à la langue
    basque. Bien sûr il n'est pas interdit, ne serait-ce qu'à l'écrit, de
    tendre vers un gascon plus consensuel et plus central que le (mi-)gascon
    des marges garonnaises ou celui des vallées pyrénéennes.
    Quand on voit déjà au niveau "pan-occitan" l'échec patent de l'occitan
    naguère appelé "référentiel", échec résultant en grande partie d'une
    carence identitaire évidente des populations proclamées "occitanes" par
    les occitanistes mais non auto-proclamées en tant que telles, on ne peut
    guère se faire d'illusion sur le succès d'un gascon "référentiel" en
    dehors des petits cercles gasconnistes ou occitanistes "modérés"...
    Ce que les Basques ont réussi à faire pour le basque constitue un
    violent contraste avec ce que les Gascons sont, pour l'heure, incapables
    de réussir et que les Occitan(-iste)s en l'espace d'un demi-siècle ne
    sont pas parvenus à concrétiser. Le sentiment identitaire n'est
    peut-être pas en soi nécessaire ET suffisant, mais dans tous les cas
    absolument nécessaire quant à la création, la norme, le standardisation
    d'une langue par élaboration de type "batua".

    Hètz beròi.

    DFS

  • Et porquoi pas !!!!

    C'est juste une question pour demander à Euskaltzaindia comment ont
    fait ils le font, et puis suivent les principes parmi tous les haut-
    parleurs de Gascon.

    Naturellement, si vous voulez ......!!

    Après tout, gasconian et des baskonians faisaient partie du même pays.
    Txabi

  • Adìu Gérard - adichats broy monde

    Que cao que disi que s'é soy iletrat en gascon,ne soy pas totun inocen.
    S'ey escribut "socialisa lo gascon",n'es pas entà deschuda lo lop adrumit, qu'é pramon l'exemple de le discusion dab Txatti muche si n'ère besonh qu'entàs comprène que cao un tchic (un pao com dits lo Tederic)de graphia comuna.
    (Que soy quoque d'un qu'a tostem refusat los estudis d'occitan a l'escòla)
    Qu'ey enbeye de partaja dab "Meste Yan" o dab Daniel lo respect é l'amo de le lenguo biarno-gascona mes que pensi adare qu'em los darès "Mohicans" é que noste responsabilitat es de décha u chance aus joens de gasconha (é yéo d'occitania) de ré inventa se cao le lenguo de le su histori.
    Qu'am gran besonh tabenh de le coneichence do pasat é de l'histori com le trobem sus lo forum de Gasconha doman.
    S'e cao de tot ent ha un monde, que cao entà avança oube embeye de soneya un tchic lo monde de doman.

    hat plan

    Didier

  • Adichatz mounde,

    D'accord avec toi Daniel, mais tu oublies une chose très importante : les Basques
    qui ont initié le basque unifié et qui avaient (et ont ?) vraiment une
    conscience de type "national" sont les Basques des provinces de Guipuscoa, de
    Biscaye et, dans une moindre mesure de l'Alava. C'est essentiellement un
    phénomène "espagnol" qui s'est développé dans l'état espagnol tout comme le
    catalanisme.

    Les Basques "français", d'ailleurs peu nombreux, n'ont fait que suivre
    (partiellement) le mouvement lancé dans un autre état que l'état français.

    Il faut reconnaître que le cas français est totalement différent de celui de
    tous ses voisins :


     tous les dialectes et langues "minoritaires" meurent plus ou moins vite (quand
    en Espagne le basque, le catalan et le galicien se stabilisent voire augmentent
    de locuteurs... quand le gallois fait de même et ne parlons pas du flamand).
    Ex : On a tendance à présenter l'Alsace comme une région où le bilinguisme
    français / allemand (et les dialectes alsaciens) se porte bien, mais j'ai lu à
    plusieurs reprises que seulement 5 % des jeunes âgés entre 18 et 25 ans savaient
    parler alsacien, donc allemand. Par conséquent, il ne faut pas être grand clerc
    pour prévoir que la pratique de l'alsacien et de l'allemand est en train de
    chuter suivant le nombre de décès...
    J'ai lu que déjà le tirage de l'édition en allemand des "Nouvelles d'Alsace", le
    quotidien alsacien, baissait régulièrement et que les bibliothèques alsaciennes
    achetaient de moins en moins de livres en allemand et en alsacien.
    D'ailleurs comment ce fait-il que l'alsacien est mieux survécu que par exemple
    le gascon. On pourrait penser que les Alsaciens étaient plus fiers, plus
    conscients de leur identité. En fait, je pense qu'il s'agit tout bêtement d'un
    fait historique : l'Alsace a été rattaché à l'Allemagne entre 1870 et 1918 et
    donc la politique hostile aux langues minoritaires favorisant le seul français
    menée par la IIIe République n'a pas été menée en Alsace. Enfin si, à partir de
    1918-19 !


     contrairement à ces exemples, aucune région française n'a été gouvernée par un
    mouvement autonomiste et ou nationaliste qui a appliqué une "politique
    linguistique" susceptible de maintenir le nombre de locuteurs ou de l'augmenter
    dans le meilleur des cas. Les scores des mouvement dits "régionalistes" sont
    très bas même dans une région dite à forte identité telle que la Bretagne. Même
    en Pays Basque "français", ils doivent faire 15 % des votes au grand maximum (en
    comprenant toutes les tendances). Cette tendance est pratiquement inexistante en
    Alsace après 1945 (entre les deux guerres l'autonomisme alsacien était très
    fort). Même les nationalistes et autonomistes corses n'arrivent qu'autour de 15
    % des votes...
    Et je ne parle pas des quelques occitanistes qui se présentent à des élections
    et qui font dans les 2 ou 3 % des votes sauf dans les cas où la personne qui se
    présente est une "célébrité" locale. D'ailleurs les catalanistes "français" ne
    font pas non plus de gros scores électoraux...

    Donc, vérité au sud des Pyrénées n'est pas vérité au nord !

    Guilhem

  • Adiu Guilhem,

    Tu as raison de faire cette remarque. C'est davantage un manque de
    précision de ma part qu'un oubli véritable. Je sais très bien que les
    Basques "espagnols" et les Basques "français" constituent deux
    sous-ensembles bien distincts. Même chose en Catalogne : du côté
    français le sentiment identitaire catalan n'a pas vraiment grand chose à
    voir avec l'ampleur et la vigueur dont il fait preuve côté espagnol.
    Toujours est-il que même en Pays basque "français" le sentiment
    identitaire n'a pas beaucoup de mal à être plus fort que le sentiment de
    "gasconnité" ou de "gasconnitude" en Gascogne lequel n'est que l'ombre
    de lui-même.
    Le cas de l'Alsace est également le reflet de la décrépitude subie et
    acceptée, je n'oserais pas dire "voulue", là-bas, comme ici ou ailleurs,
    de tout idiome ancestral autre que la langue française.
    Quant aux scores minables de nos "régionalistes" et autres "-istes",
    n'en parlons pas. Quand on pense que ce qui leur manque le plus c'est
    l'humilité et la rationalité, il n'y a pas de quoi s'étonner.
    De plus leur guéguerre stérile et fratricide entre "-istes" et
    "anti-istes" n'arrange rien. Le tout, assaisonné de l'indifférence
    massive du plus grand nombre des citoyens, ne peut qu'aboutir à la
    situation présente.
    Le fait que ce qui est vérité au-delà de nos frontières et erreur en
    deçà, et inversement, couronne le tout. Donc, je suis bien d'accord avec
    toi.

    Amistats.

    Daniel


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