Antériorité, Gascons, Basques, Catalans... et "Couyt" LAFITTEJann [Forum Yahoo GVasconha-doman 2006-10-07 n° 7219]

- Jean Lafitte

Bonjour à tous,

Je viens de lire les divers messages de l'envoi groupé n° 1284 de ce samedi
7 octobre et j'y trouve un réel plaisir à voir les choses se décanter sur
plusieurs points.

D'abord, sur l'antériorité du gascon, je trouve très pertinente la prudente
intervention de Halip Lartigue :
­ pas plus en linguistique que dans toute autre science, ce qui est acquis
aujourd'hui peut être remis en cause par de nouvelles découvertes de demain ;
mais la probabilité de celles-ci est plus ou moins grande ; ainsi, sur la
rotondité de la Terre, il est peu probable qu'on découvre demain qu'elle est
plate comme la planète Shaddock...
­ s'il s'agit de convaincre les occitanistes « purs et durs », il est aussi
peu probable qu'on arrive jamais à leur faire entendre raison : comme le dit
Halip, hors de leur dogme, ils ne veulent rien lire ni entendre ;
laissons-les donc sur leur planète Shaddokcitane. Mais il y a heureusement
des occitanistes ouverts à la connaissance. J'y reviendrai dans un message
séparé.

Sur le lien Basques-Gascons, je suis parfaitement d'accord avec les apports
de V. Poudampa et Halip, mais aussi avec les nuances avancées par Guilhem
Pépin et Daniel Séré. Pour les gens cultivés comme nous sur cette liste
‹ tant pis pour nos chevilles ! ‹ il est évident qu’il n’y a pas de hiatus
entre la civilisation basque et la civilisation gasconne. Mais cette fameuse
 » civilisation » ou » culture » si souvent évoquée n’est plus que dans les
livres et les monuments du passé. Et quand j’entends les évocations avec
trémolos de la » culture occitane »Â plus que millénaire, je ne puis
m’empêcher de sourire : c’est celle d’un monde rural, pauvre, imprégné de
christianisme et de vieux paganisme, et dont il ne reste que de bien maigres
vestiges.

On peut sur cette base historique, étalée d’ailleurs sur deux millénaires,
construire des nations et des états avec de belles frontières sur des cartes
en couleurs, ce n’est qu’un jeu ; une » utopie », mot qui, je le rappelle,
signifie » non - lieu » (ou = négation en grec, topie, du grec topos, lieu),
donc » nulle part », "enloc" en gascon.

Et j’approuve pleinement Guilhem quand il écrit : » Le nationalisme basque
ne va guère plus nous aider à sauver la langue gasconne que le nationalisme
catalan fut et est capable de sauver le languedocien. Et il faut cesser
d’extrapoler à partir de la situation d’un état étranger (l’Espagne) qui n’a
pas du tout le même vécu que le notre. »
Je dirai même que le » modèle » catalan a été un leurre particulièrement
nocif pour l’efficacité du mouvement occitan, non pas que » vérité en deça
des Pyrénées, erreur au-delà » de Pascal se vérifie ici, mais tout
simplement parce que l’histoire de la Péninsule et celle de l’Hexagone n’ont
pas du tout été les mêmes.

Il en a été ainsi notamment pour la graphie. Le Pr. Henri Gavel, qui fut le
maitre de Séguy et de Ravier à l’Université de Toulouse, rappelait par
exemple que » les Catalans et les Valenciens lisent, aujourd’hui encore leur
langue dans une orthographe qui est, à peine modifiée, celle du moyen âge.
C’est une supériorité puisque cela leur permet de connaître plus facilement
les chefs-d’œuvre de leur ancienne littérature. Mais chez eux la tradition
n’a jamais été complètement interrompue. Il n’en a pas été de même dans la
plupart de nos pays du midi [...]. Le public méridional avait tellement
perdu l’habitude de lire des textes en sa langue que reprendre simplement
l’orthographe du moyen âge eût été vouer les nouvelles œuvres à ne trouver
de lecteurs que parmi les érudits. » (Remarques sur l’orthographe de la
réédition 1926 des Poésies gasconnes de Julien Larrebat, p. 35).

Sa » prophétie » s’est malheureusement réalisée à cause de l’aveuglement des
petits bourgeois lettrés de Toulouse qui ont accompagné la » réforme
linguistique occitane » d’Alibert.

J’ai aussi apprécié l’avis très sensé et bien documenté de Tédéric sur le
livre "Vasconia" de Sarrailh de Ihartza, alias Federico Krutwig, ainsi que
le complément d’information apporté par V. Poudampa.

Finalement, cela me confirme dans ce que j’écrivais naguère sur la Liste :
 » On aura beaucoup plus de chances d’aboutir en nous limitant à des
objectifs modestes et à notre portée, plus faciles à faire accepter autour
de nous que des projets qui impliquent de changer la société pour continuer
à parler "patois". »

Enfin, Bravo à Louis Dollo pour les conseils de sagesse et e prudence qu’il
donne à la Dame de Couyt. Il a tout à fait raison, tout toponyme a un sens
 » est motivé » pour parler "savamment".

Amistats a touts.

J.L.

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