Dans Sud Ouest du jeudi 20 septembre (à tout le moins dans l’édition landaise du journal) une tribune libre n’a pas manqué d’attirer mon attention.
Elle émane de quatre élus socialistes des Landes, Xavier Fortinon, le président du département en tête, suivi par un député (Boris Vallaud) et deux sénateurs, Monique Lubin et Eric Kerrouche.
Son titre accrocheur est « De l’avenir des cultures locales ». Bigre, voilà qui est intéressant et constitue bien une des questions de base que se posent en permanence ReGasPro et Gasconha.com à propos de la culture gasconne. Celle justement qui est en arrière-plan de cette tribune libre sans être jamais nommée si ce n’est à travers une référence à Michel Serres, baptisé « philosophe gascon » pour la circonstance.
Le début est prometteur : « à une époque où toute appartenance se dilue dans le conformisme de la mondialisation -la fameuse pensée unique- et s’épuise dans l’individualisme, les traditions locales cultivent leur singularité ».
Ecrire ensuite qu’elles permettent le développement d’un lien social vivace et contribuent à la construction commune de sens nous ravit, c’est exactement ce que nous pensons.
Quand plus loin la tribune en question ajoute que « s’agissant des chasses traditionnelles, de la course landaise, des corridas et des fêtes populaires, mieux vaudrait parler de cultures locales plutôt que de traditions », comment ne pas être d’accord ? Mais alors pourquoi ne pas aller jusqu’au bout et nommer cette culture ainsi incarnée ? Peut-être si on y ajoutait la langue, jamais nommée ni même évoquée, irait-on jusqu’à parler de culture gasconne, dont la référence à Michel Serres montre bien qu’elle a été retenue au bout de la plume des signataires.
Les mots « notre identité » s’échappent même de l’autocensure des quatre mousquetaires.
Mais c’est là que tout à coup leur propos semble s’inverser. Les longs développements qui suivent paraissent destinés à annuler le signe positif de tout ce qui marquait cette identité en la conditionnant au respect d’un « politiquement correct » que la tribune libre disait vouloir combattre (la référence à la pensée unique).
D’où les poncifs inévitables : « le Sud Ouest, terre d’immigration », les fêtes populaires « facteurs d’intégration sociale… attirant même de fort loin », tout cela opposé au « repli identitaire », voire au « mal identitaire frappant à nos portes à l’Est comme au Sud du continent », un mal rabaissant les traditions au rang de folklore », etc…
Et de rappeler que les Landes accueillent 5000 nouveaux habitants chaque année.
Peut-être bien, mais il est permis d’être un peu sceptique sur l’effet positif d’afflux de millions de « festayres » à Bayonne et à Dax qui tendent à dénaturer l’ancien esprit « bon enfant », en effet rassembleur de nos populations, au bénéfice de massifs dégueulis alcoolisés (rappelons que la municipalité de Vic-Fezensac décida pour cela il y a quelques années une interruption de ses fêtes annuelles, bien à contre-cœur).
Affirmons aussi, même si c’est à contre-courant, qu’un afflux massif de populations héliothropes ne contribue pas à améliorer le lien social ni la pérennité de nos cultures locales mais plutôt à faire grimper déraisonnablement le prix de l’immobilier (le cas provençal est à cet égard bien révélateur de ce qui fut et ce qui est).
Mais rien de cela n’est seulement effleuré par nos mousquetaires qui sont les héritiers d’une volonté de transformer leur département en Californie française, projet où le local, le proche, ne compte plus pour grand chose. Au bout d’un tel chemin, pour le coup, les traditions locales ne seraient plus que du folklore pour touristes et néo-Landais attirés en masse.
En achevant cette lecture on se demande quelle a été l’intention des signataires : « urgence à défendre nos cultures dans le sens ouvert et inclusif » ou au contraire montrer qu’on est au premier rang de la lutte contre tout ce qui marquerait le réveil d’identités locales ou nationales, appuyées sur un désir de remettre culturellement, socialement et économiquement, s’il se peut, le proche et le local au premier rang ?
Ou tout simplement, posture politicienne à peu de temps d’élections européennes : en ce cas il s’agirait de rabattre les troupes tout en essayant de ne pas perdre les chasseurs et autres amateurs de jeux taurins.
Où est la culture gasconne dans tout ça ?