La génétique des populations a permis, ces 10 dernières années, d’avoir une vision globale et à gros traits du peuplement de l’Europe. Il convient d’être très au clair sur les différentes étapes désormais mises en évidence, pour comprendre comment, des millénaires après, émergent les populations contemporaines, dont les Basques, et les populations avoisinantes.
L’ADN ancien résout le puzzle de l’origine des Basques
Je me permets de reprendre un précédent texte mien, qui se veut de la vulgarisation :
“Pour faire simple, en affinant avec des échantillons d’ADN ancien, notamment de la steppe est-européenne dont sont issus les Indo-Européens et les civilisations de l’âge du Bronze, il a été clairement mis en évidence les choses suivantes :
– Les populations autochtones de l’Ouest européen (WHG) sont les chasseurs cueilleurs de Lascaux et Altamira, population éteinte, aux yeux bleus et à la peau foncée ;
– Ils ont été génocidés, en tout cas remplacés, par des fermiers du Néolithique (EEF) en provenance d’Anatolie : ils se sont quelque peu métissés à mesure de leur progression vers l’Ouest, mais jamais en de grandes proportions ;
– Une vague en provenance d’Europe de l’Est a déferlé sur l’Europe de l’Ouest à l’Âge du Bronze. Il y a eu remplacement quasi total des populations en Europe du Nord (des îles britanniques à la Russie actuelle). En Europe du Sud, il y a eu métissage car les sociétés néolithiques étaient mieux organisées, apparemment : ce sont les sociétés campaniformes. Ces populations de la steppe, avec cheval notamment, ont charrié les langues indo-européennes et ont amené une génétique faite d’un mélange de génétique de chasseurs cueilleurs de l’Est de l’Europe (EHG), de fermier néolithiques (EEF) et de génétique du Caucase (CHG), qui est la base du peuplement ancien de l’Iran notamment.
Bref, une mesclagne ... WHG + EEF + CHG + EHG ...
Les langues dans tout ça ? Il semble que le basque, comme toutes les langues pré-indo-européennes parlées sous Rome (l’ancien sarde, l’étrusque, l’ibère, le ligure ancien, le tartéssien, ...), aient été les restes des langues paléo-sardes (en effet, les Sardes sont les seuls à avoir grosso modo évité la vague du Bronze) parlées par les populations du Néolithique, puis parlées par leurs descendants métissés.
On ne sait rien d’écrit de la transition entre Néolithique et Âge du Bronze, mais elle a été violente apparemment : quasi toutes les lignées mâles ont été remplacées, par des porteurs de l’ADN paternel R1b. C’est l’apport des dernières études : R1b est un marqueur de la steppe, à tout le moins des sociétés de la culture campaniforme, vraisemblablement née sur le Rhin par la confrontation de fermiers du Néolithique et de migrants de la steppe (qui a ensuite déferlé vers le reste de l’Europe).
Les Basques sont donc une population métissée de l’âge du Fer. Les études sont même formelles : il est délicat de différencier génétiquement à l’âge du Fer, donc au moment de l’arrivée de Rome dans la péninsule ibérique, les populations anciennes qui habitent le Pays Basque actuel des autres habitants de la péninsule, qu’ils soient ibères (donc locuteurs d’une langue pré-indo) ou indo-européens. Autrement dit, la conquête par les campaniformes de l’Europe s’est faite partout, mais selon les contextes, l’on a continué à parler une langue pré-indo, tandis qu’ailleurs non. Il est envisageable que le basque soit alors un pidgin pré-indo/indo.”
I - Une analyse par graphique PCA
Nous en sommes donc à l’âge du Fer, c’est à dire -800 avant JC, jusqu’au 1er siècle de notre ère, et la péninsule ibérique comme le sud de la France actuelle sont habités par des populations héritières des civilisations campaniformes, aux langues diverses (des langues pré-indo-européennes comme l’ibère, le tartéssien, le ligure, l’aquitain, ..., d’autres des langues indo-européennes infiltrées dans la région à l’âge du Bronze, comme l’ancien cantabre, le lusitanien et évidemment le celte, probablement le dernier arrivé), mais à la génétique assez similaire.
Sur ce premier "PCA" (Principal components analysis), qui simplifie l’analyse du génome des individus en coordonnées, l’on comprend assez bien le phénomène : en bas, les populations autochtones d’Ibérie, qui vont rencontrer les migrants de la steppe (en haut à gauche), où se trouvent toujours les populations modernes d’Europe du Nord et de l’Est, pour donner naissance à des populations intermédiaires à l’âge du Fer.
Sur cette question, un article primordial d’Iñigo Olalde :
L’histoire génomique de la péninsule ibérique durant les 8000 dernières années
Notez sur le PCA qu’il y a des individus un peu aberrants dans le groupe "Occitanie", qui se trouvent en haut à gauche : ce sont des "migrants" inaltérés qui s’installent encore à l’âge du Fer dans le cadre de la mobilité européenne. Le terme "Occitanie" est mal choisi, et il est dommageable qu’une région administrative ait une telle influence pour des considérations scientifiques ; ce sont des échantillons du Languedoc méditerranéen :
Pour nous repérer, ajoutons des populations contemporaines : au hasard, les Nordistes en France, les Basques d’Espagne et les Andalous.
L’on comprend aussitôt que les Basques d’Espagne se retrouvent au milieu des populations de l’âge du Fer d’Ibérie, là où les Andalous ont subi une dérive vers la droite, vers les populations italiennes (l’on verra après la raison). (Les Nordistes français relèvent de l’univers de l’âge du Bronze, quelque peu dévié lui aussi vers la droite d’ailleurs).
À ce propos, il semble que la division entre France du Nord et France du Sud préexiste au moins depuis l’âge du Bronze, avec une population au nord ayant été plus intensément sujette aux migrations en provenance de la steppe (et donc encore de nos jours, plus en liaison avec l’Europe du Nord et de l’Est, à tout le moins transitoire).
Affinons. Nous disposons d’échantillons précis pour de nombreuses sous-régions basques, désormais, depuis une étude récente :
Genetic origins, singularity, and heterogeneity of Basques
Cela devient assez vite illisible, mais rajoutons une dernière fois d’autres populations : miracle, cette même étude possède des échantillons d’individus originaires des zones que l’article appelle "péri-basques", dont la Chalosse, le Béarn et la Bigorre. Mettons également les habitants de La Rioja, et les Auvergnats.
Compte tenu de la difficulté à lire le PCA à ce stade de densité de points, je vais utiliser les moyennes de points de l’ensemble des individus de chaque groupe. Reste que la tendance est déjà là : La Rioja dérive également tout comme l’Andalousie (mais moins), les Gascons du Sud dérivent également mais bien moins.
Sans même maîtriser les coordonnées du PCA, sa lecture est intuitive :
L’on observe la dérivation vers la droite de l’ensemble des points espagnols, plus intensément à mesure que l’on s’éloigne du foyer basque, resté proche de la variation de l’âge du Fer. L’article cité plus haut a mis en évidence, après Olalde, que la distinction basque est récente : elle date des temps historiques, les Basques ont échappé aux phénomènes ultérieurs affectant la péninsule ibérique.
Ces phénomènes sont connus : c’est Rome, 4 siècles d’intégration au sein de l’Empire Romain et des échanges méditerranéens et c’est la conquête musulmane par les Arabo-Berbères d’Afrique du Nord. Je passe sous silence les migrations germaniques dont les Wisigoths, qui s’intercalent, car elles ont été le fait de peu d’individus qui se sont fondus et se firent "Romains" (l’article d’Olalde aborde la question cependant, pour un cimetière wisigoth en Catalogne actuelle).
Les Espagnols dérivent donc, avec quelques surprises, ou confirmations, c’est selon :
– Le point Spanish_Biscay correspond aux Encartaciones de langue romane à l’ouest de Bilbao. Ils se distinguent plutôt nettement du point Basque_Biscay, en montrant une dérivation.
– Il y a un problème avec un individu de l’échantillon cantabre, qui se trouve trop à droite (ce qui sème le doute sur son caractère autochtone), ce qui truque quelque peu la position médiane, mais en moyenne, ils montrent une grande variation, allant du point des Encartaciones à une variation espagnole classique, et dans tous les cas, ils se trouvent dans la variation castillane.
– Les Catalans d’Espagne ne sont pas nettement différenciés des autres Espagnols, en tout cas des Espagnols du Nord.
– Les romanophones de Navarre (Spanish_Navarre), au sud, possèdent une variabilité génétique similaire au gros de l’Espagne centrale et septentrionale, très différente des points basques de Navarre. Le "gap" n’est pas surprenant pour qui connaît un peu ces contrées, mais il est parmi les plus impressionnants que l’on puisse constater, au vu du peu de kilomètres entre Tudela et la zone bascophone.
– Les points castillans ayant le moins dérivé sont sans surprise Soria et Burgos.
– L’Espagne de l’Ouest et du Sud montre une plus grande dérivation vers la droite (et soit dit en passant, la celticité de la Galice est évidemment ridiculisée) : il est donc temps de dire à quoi elle correspond.
Prenons alors un peu de recul, en ajoutant les Italiens.
On le voit, la dérivation des Espagnols se fait vers les Italiens modernes. Ce qui contraint à comprendre pourquoi les Italiens se trouvent "là" sur le PCA, la question de savoir pourquoi les Espagnols modernes tendent vers l’Italie depuis leur "base" basque étant évidente en revanche : c’est Rome.
L’Italie possède le même peuplement, initialement, que le reste de l’Europe occidentale, à savoir des fermiers EEF qui vont rencontrer la culture campaniforme forgée par les migrations des steppes. Mais la spécificité italienne aux temps historiques va se faire via les intenses migrations grecques de la Magna Graecia, puis sous l’Empire romain, via les migrations orientales. Ce double phénomène migratoire fait que les Italiens, notamment ceux du Sud, sont génétiquement pour moitié pour ainsi dire des Orientaux.
L’Empire romain va charrier dans toute l’Europe une variabilité génétique de la Méditerranée orientale. Que sont donc les Espagnols modernes, à larges traits là encore ? Des "métis" entre les autochtones ibères à la génétique bascoïde et les colons romains de toute la Méditerranée. L’on peut même essayer de quantifier la mixité.
Et l’Afrique du Nord dans tout ça ? Le peuplement de l’Afrique du Nord est complexe, mais la base principale de son peuplement est CHG (la composante caucasienne, très forte en Iran), qui tire les populations vers la droite, tout comme les Italiens. Autrement dit, un métissage nord-africain va également tirer vers la droite les populations : cela explique la position plus à droite que tous les Espagnols des Canariens, population métisse qui a absorbé les anciens Guanches.
– Revenons aux Français : un décalage vers la droite signifie-t-il tout comme pour les Espagnols un métissage romain ? A priori, oui. C’est exactement ce qui est arrivé aux Gascons : sur la "base" basque du Fer, un métissage, plutôt réduit, mais réel, avec les colons romains (qui ont amené le latin) a abouti à un décalage.
Et les Auvergnats dans ce schéma ? Ils sont plus "haut", c’est à dire plus ouverts aux influences septentrionales, mais sans forcer le PCA, l’on décèle bien la dichotomie entre la France du Nord et la France du Sud. La France au nord de la Loire, probable frontière, se trouve dans une variabilité classique de l’Europe du Nord, quand les Provençaux tirent franchement vers l’Italie (et les Corses, évidemment, sont italiens).
Les grandes lignes sont claires : les Basques ont échappé, à une date historique pour des événements qui nous échappent, à l’influence de Rome, puis à celle d’Al Andalus. Mais reste un mystère à élucider, avant de continuer : pourquoi les Galiciens et autres populations de l’Ouest de la péninsule ibérique (les Portugais sont dans le même cas), sont-ils si "orientaux" ?
La réponse est probablement à chercher dans l’Histoire des migrations sous l’occupation musulmane : les populations chrétiennes mozarabes, descendantes des populations fortement romaines du Sud de l’Espagne, sont remontées vers le nord, pour refuser la conversion (les convertis, eux, se sont mêlés aux classes dirigeantes, et leurs descendants finirent par être expulsés par les Rois catholiques vers l’Afrique du Nord). Ces phénomènes sont parfaitement attestés : une ville comme León a été repeuplée par des Chrétiens originaires du sud, déplacés. Les royaumes chrétiens au nord, dont celui des Asturies, ont bel et bien été le refuge des gens du sud, qui ont amené leur génétique dans les confins atlantiques de Galice et d’Oviedo.
Évidemment, l’on peut s’interroger si de base, et en tout état de cause, la romanisation n’avait pas été intense en ces terres. Rien d’incompatible, mais comme nous allons le voir immédiatement, la présence d’un métissage, réduit, mais réel, nord-africain, montre qu’il s’est passé quelque chose (les populations ibères de l’Andalousie romaine étaient très métissées des voisins d’en-face).
II - Quantifions l’apport romain !
Je vais prendre, de manière très grossière, 4 points de référence :
MAR_Taforalt : le peuplement ancien du Maroc septentrional ;
Iberia_North_IA : une moyenne du peuplement de l’âge du Fer dans le nord de la péninsule ibérique ;
FRA_Occitanie_IA2 : une moyenne du peuplement de l’âge du Fer dans le sud de la Gaule ;
ITA_Rome_Imperial : une moyenne du citoyen romain lambda sous l’Empire à Rome (son positionnement sur le PCA le place au milieu des Grecs modernes du Dodécanèse et des Juifs sépharades) ;
Et je vais demander à un algorithme de faire une approximation en fonction de ces 4 points.
Target : Basque_Araba
Distance : 1.5302% / 0.01530169
54.6 Iberia_North_IA
22.8 Iberia_East_IA
22.6 FRA_Occitanie_IA2
Que des composantes du Fer : aucun apport nord-africain ou romain.
Target : Basque_Soule
Distance : 2.0017% / 0.02001652
53.4 Iberia_East_IA
46.0 Iberia_North_IA
0.6 ITA_Rome_Imperial
0,6% Romain en Soule, c’est la marge d’erreur, mais ce peut être aussi le signe de l’influence minime béarnaise car ...
Target : French_Bearn
Distance : 1.4043% / 0.01404344
41.2 Iberia_North_IA
35.0 Iberia_East_IA
18.0 FRA_Occitanie_IA2
5.8 ITA_Rome_Imperial
... tout de suite, l’on arrive sur 6% quasi d’apport romain en Béarn.
Target : French_Chalosse
Distance : 1.2773% / 0.01277280
36.6 Iberia_North_IA
33.6 Iberia_East_IA
24.8 FRA_Occitanie_IA2
5.0 ITA_Rome_Imperial
Un poil moins pour la Chalosse.
Target : French_Bigorre
Distance : 1.2419% / 0.01241917
41.8 Iberia_East_IA
32.0 Iberia_North_IA
18.0 FRA_Occitanie_IA2
8.2 ITA_Rome_Imperial
Et un poil plus pour la Bigorre, en conformité avec ce que l’on sait de la plus grande présence de toponymes latins en -anum en Bigorre.
Target : Spanish_Aragon_North
Distance : 1.3406% / 0.01340595
39.0 Iberia_East_IA
30.6 FRA_Occitanie_IA2
21.0 Iberia_North_IA
9.2 ITA_Rome_Imperial
0.2 MAR_Taforalt
En Aragon du Nord, on est sur 9% ! Et l’on voit apparaître, potentiellement en bruit, une influence nord-africaine, dans la marge d’erreur.
Target : Spanish_Galicia
Distance : 1.1692% / 0.01169215
43.2 Iberia_North_IA
23.6 FRA_Occitanie_IA2
20.2 ITA_Rome_Imperial
9.0 Iberia_East_IA
4.0 MAR_Taforalt
Ce n’est plus la marge d’erreur en Galice : 20% Rome, 4% l’Afrique du Nord, un quart de la variabilité génétique de dérivation par rapport à l’âge du Fer.
Target : Portuguese
Distance : 1.1120% / 0.01112025
29.4 Iberia_North_IA
25.8 FRA_Occitanie_IA2
22.8 ITA_Rome_Imperial
17.4 Iberia_East_IA
4.6 MAR_Taforalt
Il se confirme que les Galiciens sont "portugais".
Target : Spanish_Burgos
Distance : 1.4325% / 0.01432527
44.8 Iberia_North_IA
30.4 Iberia_East_IA
12.2 FRA_Occitanie_IA2
12.2 ITA_Rome_Imperial
0.4 MAR_Taforalt
L’apport nord-africain redevient très faible à Burgos.
Target : Spanish_Pirineu
Distance : 1.1911% / 0.01191108
31.0 Iberia_North_IA
28.8 Iberia_East_IA
22.4 FRA_Occitanie_IA2
16.6 ITA_Rome_Imperial
1.2 MAR_Taforalt
On voit que les Pyrénées catalanes n’ont pas échappé à la romanisation, et vraisemblablement pas, vu le petit niveau - mais réel - d’affinité marocaine, réel, à la remontée mozarabe vers le Nord.
Target : Basque_Baztan
Distance : 2.0186% / 0.02018565
46.4 Iberia_East_IA
42.6 Iberia_North_IA
11.0 FRA_Occitanie_IA2
On revient chez les Basques, que des composantes du Fer, pas de Romain, pas d’Afrique du Nord.
Target : Spanish_Biscay
Distance : 1.5521% / 0.01552104
35.4 Iberia_North_IA
30.2 Iberia_East_IA
25.4 FRA_Occitanie_IA2
7.8 ITA_Rome_Imperial
1.2 MAR_Taforalt
Les Encartaciones montrent une vraie influence romaine, et aussi nord-africaine ...
Target : Basque_Biscay
Distance : 1.6760% / 0.01676035
49.4 Iberia_East_IA
28.0 Iberia_North_IA
22.6 FRA_Occitanie_IA2
... tandis que la Biscaye bascophone n’en montre aucune : quel gouffre là encore ! Du niveau de celui entre les deux Navarres.
L’on pourrait continuer comme ça, mais l’on a compris le sens global : ce qui manque à mon analyse, c’est parvenir à distinguer finement les composantes du Fer, notamment l’apport celtique proprement dit avant l’arrivée de Rome, mais nous manquons d’échantillons français de cette époque. Quid de la France, selon ce modèle ?
Target : French_Auvergne
Distance : 1.8528% / 0.01852850
55.6 FRA_Occitanie_IA2
28.6 Iberia_North_IA
15.8 ITA_Rome_Imperial
On voit que l’Auvergne a été romanisée, 16% ce n’est pas négligeable.
Target : French_Brittany
Distance : 4.0079% / 0.04007922
100.0 FRA_Occitanie_IA2
La distance de l’approximation est trop grande (4%), cela signifie que les échantillons de départ ne collent pas avec l’histoire de la Bretagne, mais en tout cas, aucun apport romain, et rien en commun avec le Fer ibère (fatalement, la Bretagne est dans une variabilité européenne steppique d’Europe du Nord).
Target : French_Provence
Distance : 2.1074% / 0.02107353
62.0 FRA_Occitanie_IA2
27.6 ITA_Rome_Imperial
10.4 Iberia_North_IA
Et sans surprise, en France, c’est en Provence que l’apport romain est le plus important.
***
Conclusion :
Rome a créé les Basques. On ne saura jamais vraiment pourquoi, mais ils ont échappé à l’intérêt impérial, et ont pu rester isolés. Il est possible que d’autres contrées d’Espagne avaient également échappé à Rome, mais elles n’ont pas alors échappé aux migrations historiques consécutives de l’invasion musulmane (que l’on détecte via la remontée vers le nord d’une composante nord-africaine).
Sans surprise, les populations péri-basques qui entourent le monde basque actuel ont agi comme zone-tampon : elles montrent une influence romaine, et de fait, les habitants des Encartaciones, comme ceux de Burgos et Soria, comme les Gascons, sont passés au latin. L’on sait combien le gascon comme le castillan portent la marque du substrat de la proximité basque (notamment la répugnance pour f et v).
Il est en l’état impossible de quantifier l’apport proprement celtique à l’âge du Fer, faute d’échantillons, mais il est certain que bascophones de cette époque comme celtophones étaient génétiquement similaires, tout comme les Latins sont similaires aux voisins étrusques. Les raisons qui ont fait que dans telle zone une langue indo-européenne s’est imposée, tandis qu’une langue pré-indo-européenne s’est maintenue, restent mystérieuses. D’ailleurs, rien ne dit que dans des zones réputées indo-européennes l’on ne parlait pas dans certains endroits des dialectes pré-indos, et réciproquement : le monde ancien était moins homogène (cf la découverte d’inscriptions basco-aquitaines dans les hautes terres de Soria, pourtant réputées celtibères).
Pour revenir plus précisément aux populations sud-gasconnes échantillonnées, Béarnais, Chalossais et Bigourdans, elles se différencient toujours précisément des Basques voisins, dont elles dérivent. Il convient donc d’analyser la romanisation de nos contrées aussi sous un angle migratoire, la question étant de savoir si l’apport romain s’est fait de proche en proche (via les grandes métropoles comme Burdigala et Tolosa au fil des alliances et des générations, ainsi que des migrations) ou bien si les colons latins ont eu une descendance directe métissée au sein des Tarbelles, Iluronenses, Venarni et Bigorritani. Ce qui nécessite de revaloriser le cosmopolitisme des villes antiques comme Dax, ou encore la puissance du phénomène de colonisation agricole (cf toponymes en -anum, voire -acum). Cela dit, il conviendrait également d’avoir des approximations numériques de la population antique : le boom démographique s’est fait au Moyen-Âge, sur une base probablement réduite de personnes.
Dans tous les cas, il est quelque peu rassurant de constater que si les langues bougent, ce n’est pas sans locuteurs qui les charrient. Tout comme il est rassurant de constater l’existence d’une Vasconie, Basques et péri-Basques, attestée par la linguistique et d’autres indices, mais qui en vérité se caractérise plutôt par une plus grande imperméabilité aux faits historiques à compter de Rome, plutôt que par le passé protohistorique. Tout est bien récent, en somme.
Quelques contrées mériteront des études plus poussées : on pense notamment à tout le vaste sud de la France, en silhouette l’ancienne Occitanie linguistique (du Poitou à la Provence), qui donneront probablement les raisons de la différence entre la France du Sud et la France du Nord. Mais notre pays se crispe sur ces questions, malheureusement.