"crounhic" et "légagnes" Dominique

Deux mots employés par mon père né il y a 100 ans à Arcachon où sa mère venue de Chalosse était bonne dans la ville d’hiver, me sont revenus : je me demande si ce sont des mots gascons : "crounhic" avec un n mouillé, désignant le croûton de pain, et "légagnes" les petites mucosités du coin de l’oeil que l’on doit débarbouiller avant d’aller à l’école.
Mais c’est peut-être une invention paternelle.
Cela m’importerait vraiment de le savoir.
Adishats a tots.

P.-S.

laganha et ses variantes de forme ou d’écriture est connu, et curieusement a retenu l’attention de pas mal de "gasconhautes", peut-être parce que le français n’a pas (apparemment) de mot équivalent.

Grans de sau

  • Cronhic m’est inconnu, par contre "conhic" (pr :cougnic) est bien un croûton de pain en gascon landais en tout cas.
    Leganha (pr :legagne) est en français une "chassie", mot guère connu ni employé (on connait mieux les yeux" chassieux").

  • Mon père né il y a 83 ans me confirme que « légagnes » sont bien des petites mucosités au coin de l’œil. Sûrement terme employé dans le nord de la Gascogne landes bordelaises :
    « Qu’as la legagne au cunh de l’oelh » expression qu’on lui disait souvent tout petit m’a-t-il dit.

  • Je n’ai jamais parlé que de légagnes pour nommer ces mucosités de l’oeil, et je n’ai pas 100 ans. : )

    J’ai longtemps pris le mot pour très correct en français, comme mouquire.

  • Je confirme :"legagne" et "mouquire" sont restés très vivants en français régional de Gascogne ; ils étaient courants dans le Bordeaux de mon enfance mais je suppose que ce n’est hélas plus le cas...
    Il serait urgent de reconquérir la langue car le français régional se normalise de plus en plus. Il n’est plus une expression de notre identité à l’abri de la disparition puisque, par définition, il est exception à la "norme" véhiculée par les média de toute sorte (qui elle même bouge mais pas dans notre sens. )

  • Merci à vous de ces réponses, en y repensant , je crois aussi que c’était "conhic" et que c’est la contamination de croûton qui m’a fait mettre un "r".
    Du coup j’ai une autre question qui me vient, mon Père appelait l’autorail pour aller à Saint Sever ou à Peyrehorade, je ne sais plus trop, la "Pauline" et non la "Micheline" comme on le disait ailleurs, y aurait-il quelque gasconaute qui aurait déjà entendu la même chose et qui saurait pourquoi ?
    Bien à vous tous.

  • Adishatz Dominique,
    pour répondre à ta dernière question : mon père qui aurait 102 ans cette année appelait aussi la micheline "pauline" ; en fait c’est le surnom donné aux anciens autorails du midi construits sous l’impulsion de Jean-Raoul Paul.

  • je confirme, "cougnic", "lagagne"/"lagnagnous", "mouquire"/"mouquirous" sont très utilisés en Chalosse

    désolé, j’écris en phonétique...

  • Mercés plan a tots !
    Nantie de vos réponses hier soir dimanche, j’ai été musarder sur le site au hasard, lisant anciens "ligams" , "grans de sau", et comme la remarque de Gerard Sent Gaudens sur la normalisation de la langue française me trottait dans la tête, j’ai été frappée de quelque chose :
    c’est la qualité de la langue insufflée par le gascon et la culture gasconne que l’on trouve ici sur ce blog dans les billets des uns et des autres.
    Moi qui n’ai jamais vécu au sud de la Loire sauf pendant les merveilleuses vacances, j’ai toujours remarqué la formidable force de la langue française parlée et écrite par les Gascons.
    Que ce soient les gens de ma famille, tous ouvriers ou domestiques qui avaient au mieux leur certificat d’étude, que ce soient mes Professeurs d’Université gascons de Paris quand je préparais dans les années soixante l’agrégation, il y avait une "inscription" proprement spécifique des gens de chez nous dans le français.
    J’ai retrouvé la même chose dans le livre en français de Bernard Manciet "le golfe de Gascogne", je dois dire que je ne connaissais pas l’auteur et que j’ai trouvé ce livre dans une librairie d’Orléans, et là choc ! une langue française, une culture investie et non envahie par le gascon, cette langue là, ce beau français au souffle gascon, est peut-être une piste pour notre identité.
    Amitiés à tous et à chacun.

  • Je suis tenté d’avancer deux raisons à la qualité du français supposé parlé et écrit en Gascogne (mais je ne suis pas sûr que tout le monde soit d’accord, ni avec la constatation de Dominique ni avec les deux raisons que j’avance) :

     ceux qui ont acquis une langue plus tard que les autres la respectent mieux et en tous cas pendant davantage de générations ; ; je le vois bien dans des échanges demèls en français entre Français, Magrébins et Subsahariens dans mon univers professionnel : ceux dont le français est le meilleur sont sans conteste les Africains et nord-africains, la plupart des Français estropiant et anglicisant les formes et confondant les conjugaisons.

     en pays d’oc et en Gascogne en particulier, peut-être pour être restés plus longtemps proches de la ruralité, nous employons une langue et un vocabulaire plus imagé et enraciné dans le réel que les Franciliens de "vielle" souche dont la langue est devenue plus resserrée et plus abstraite (virtuelle bientôt).

    Cela dit, j’aimerais que les Gascons, tout en continuant à pratiquer ce genre de français là, se réapproprient des traits culturels qui leur sont plus profondément personnels, telle la langue gasconne, et je rejoins là le fil parallèle issu de mon post sur le concert des Esclatats, Pagalhos et autres..
    La langue gasconne que nous aimons, même tant soit peu normalisée (il le faut, faute de disparition ou de fusion dans un occitan artificiel) doit garder son côté "xucos" ou "shucos" si l’on préfère, et c’est bien un des problèmes de la réappropriation de la langue.

  • Lo francés regionau, barrejat de gascon, existis encara en per la region bordalesa. S’entend encara dider "Oh, la care qu’il tire", ou "Essuie-toi la mouquire". E aquò quitament de la par de junes, damorant en "citat".

  • Voila qui me rassure(un peu) !

  • Il faut probablement ajouter l’effet que fait l’accent gascon en français (un exemple : Pierre Albaladéjo) : c’est snob.
    D’ailleurs, les autres méridionaux perçoivent exactement ainsi l’accent gascon : un peu hautain et disons-le prétentieux.
    Il est très clair que l’accent gascon se distingue très nettement de l’accent guyenno-limousin (qui sonne "faux" à mes oreilles : c’est clairement le "Sud" mais l’accent dans la phrase semble placé toujours bizarrement), de l’accent provençal évidemment, moins de l’accent toulousain, le vrai.

  • Es vrai aquò. Autescòps, l’accent bordalés daus Chartrons èra considerat coma elegant. Una punta d’accent gascon, ende saupicar la conversacion.

  • David, que crèi que lo leugeir (o pas !) accent gascon hort aisit de reconeixer de la borgesia bordalesa d’autes cops (adara, malaia !) qu’era de las vielhas familhas catolicas de la Lana (tipe los de Mauriac) mès pas deus Chartrons si entenetz pr’aquo los negociants protestants d’origina britanica, nord -europea, barrejats de familhas de la vath de Garona ; l’accent d’aqueths era -qu’es enquera - un chic a part com lo tic de parlar de Beurdeu si m’escadi a imitar correctament dab un quaucomet d’accent anglès tabé ...
    L’accent deus "petits" chartrons (comerçants e mestieraus deu quartier com los mos ajous deu costat mairau - que n’ei pas jamei entenduts a part la mia mair, plan segur ) que parlavan mès dab un accent gascon bordalès.

  • Jean Lacouture (bordelais) dit qu’une des fonctions importantes de l’école des Jésuites où il a étudié était de débarrasser les élèves de leur accent (je ne sais plus comment il qualifie cet accent ; "du sud-ouest" probablement).

  • Parli d’un Bordèu d’i a bèra pausa, segur.
    Estut estudiat per un gran lingüista de l’universitat de Bordèu, Paul Burguières (1919-2000), que’n analizet la fonetica, notadament.
    N’èra plan l’accent daus "petits" Chartrons, que caracterizava petits artesans e botiquèirs.
    E avè (a çò que pait) un caractèr gascon "elegant" marcat, que, pareish, la quite borgesia bordalesa d’origina estrangèira, dau monde dau negòci (Lawton, Azogui, Pereira...) aimava l’imitar (èra au cap dau sègle XIXau), que hasèva "chic". Es çò qu’entenduri, n’èi pas poscut verificar.

  • être "lagagnous" : avoir des lagagnes dans les yeux.

    Le cougnic est aussi le nom pour "cochon d’Inde".

  • Bonsoir. Au cours d’une conversation avec des amis je me suis vu parler de légagne sans que mes interlocuteurs comprennent ce que je voulais dire. Je viens donc de me connecter sur internet pour leur montrer que ce mot etait bien français ... mais hélas il est en patois gascon. Il faut dire que je suis originaire du Lot-et-Garonne et que depuis mon enfance j’ai toujours entendu utiliser ce mot. Merci pour votre site qui m’a permis de me sentir moins seule !
    Karine

  • Moi aussi, Juilla, je suis originaire du Lot-et-Garonne, de Marmande, plus précisément. Et le mot usité là-bas pour "chassie" était bien leganha (légagne) avec la variante laganha (lagagne) dans certains coins, exactement comme en espagnol à part que dans ce dernier cas nh est remplacé par ñ.
    Ce mot a donné leganhós, leganhosa (légagnous, légagnouze) / laganhós, laganhosa (lagagnous, laganouze) qui signifie "chassieux, chassieuse".


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