Christian Laborde serait-il le meilleur romancier gascon aujourd’hui, depuis la mort de Bernard Manciet il y aura juste 10 ans en juin ?
La question ou peut-être même l’évidence m’est venue à l’esprit ces jours –ci en relisant Flammes son roman de 1999 que j’avais acheté au début des années 2000 dans son édition en Livre de Poche où il est sans doute toujours disponible.
Je ne suis guère lecteur de romans et reconnais que mon intuition manque tout autant de base statistique que de compétence en critique littéraire. Mais enfin mon intuition en ce sens est forte.
A quoi reconnaitre un vrai et sans doute un grand roman si ce n’est à ce mélange d’une histoire bien contée, qui présente en elle-même un certain intérêt – pas le nouveau roman, quoi, qui ne raconte en fait aucune histoire – et de la peinture précisément ciselée ou seulement esquissée en belles touches impressionistes, au choix, d’un monde, d’un lieu, d’une société, quelle qu’elle soit ?
Et avec un style net, personnel, évocateur, un peu hardi s’il le faut.
On trouve tout ça chez Laborde et avec en plus, comme chez Manciet, des phrases sèches, courtes, des chapitres qui ne trainent pas en longueur, tout comme l’histoire elle-même.
Avec en moins bien sûr la langue gasconne mais, comparée à toute la production francophone, en plus, une évocation multiliforme de notre culture et pas seulement par les phrases en « lenga nosta » fréquemment intercalées dans le texte français. Tout cela sans faire tomber pour autant l’auteur au rang si méprisé des écrivains « locaux » ou régionalistes » (qu’est-ce que le régionalisme viendrait faire là-dedans d’ailleurs ?), qu’on trouve généralement relégués en bout de comptoir des grandes librairies.
Disons tout : à l’époque les phrases en gascon, transcrites en une excellente graphie classique [1], avaient probablement été le déclic conduisant à l’achat le médiocre lecteur de roman que j’étais, encore une fois.
Mais l’ensemble du texte avait bien tenu sa promesse : c’était bien toute l’étouffante chaleur d’été de nos villages du piémont pyrénéen, l’omniprésence obsédante des maïs à l’allure belliqueuse d’indiens Iowa (il fallait le trouver !), bref toute une ambiance assez lourde parfois qu’on retrouve aussi bien dans les meilleurs romans d’un Mauriac ou dans le « Gojat de Novemer » auquel Flammes m’a fait penser à bien des égards.
Et plus d’une fois je me suis demandé quelle allure aurait ce texte intégralement « rendu » à la langue gasconne ; il est bien possible que le traducteur le plus indiqué serait en ce cas l’auteur lui-même, comme Manciet encore qui était le traducteur de ses textes du gascon en français.
Voilà ; je livre ces réflexions à l’opinion des gasconhautes habitués ou aux lecteurs de rencontre de notre site qui auront peut-être lu davantage de l’œuvre de Laborde ; jusqu’à présent c’est là ma seule approche de celle-ci.
J’espère ne pas m’arrêter là, tout comme j’espère compenser mon ignorance en prenant le temps de lire quelques romans des Gonzalès, Javaloyès et autres représentants de l’école gasconne des vingt ou trente dernières années, celle des écrivains de l’Escòla Gaston Febus, rhabillée en vêtements occitans, justement, tous ces écrivains que je n’ai guère lus jusqu’à présent. Mais on n’est pas sectaire à gasconha.com !