Une hypothèse expliquant l’évolution phonologique du Gascon (et partiellement du Basque). Andriu d’Agenés

L’évolution phonologique la plus remarquable du Gascon par rapport au latin est le passage du f au h aspiré (le traitement de f est plus divers en basque : f abouti à p, b, h).

Y aurait-il une explication d’ordre physiologique quant à l’impossibilité de prononcer cette labio-dentale (= consonne prononcée par le passage de l’air entre la lèvre inférieure, venant s’appuyer contre les incisives supérieures, et ces incisives supérieures) ?
L’idée est la suivante : la perte d’une, plusieurs, voire de toutes les incisives supérieures avec l’âge entraîne l’impossibilité de prononcer correctement la consonne f.

Pour que cette prononciation altérée du f puisse se perpétuer sur les générations suivantes, il faut que les enfants Gascons (et Basques, Castellans, Cantabres, mais aussi Sardes, Calabrais) aient appris leur langue auprès de personnes âgées. Ceci implique une structure familiale où toutes les générations résident ensemble dans la maison. Et si l’aïeul représente l’autorité, ceci lui donne le statut le référent, en particulier pour la prononciation de la langue. Or c’est précisément cette structure, le type « famille souche » qui semble attesté dans les Pyrénées centrales et occidentales. De plus, on doit prendre en compte le fait que les femmes, de tout temps, ont vécu en moyenne plus âgées, et ont été plus susceptibles d’atteindre l’âge de la chute des dents. La phonologie a pu ainsi évoluer par la prononciation des aïeules édentées entendue par les enfants.

Regardons maintenant si la perte des incisives supérieures entraîne d’autres conséquences sur l’évolution phonologique ?
L’autre labiodentale qui est le v devient difficilement prononçable (fuite d’air), d’où, pour « rectifier le tir », passage à des articulations proches :
 bilabiale  ? ou b : vaca prononcé baca) -similitude avec le languedocien et les langues ibériques-,
 semi-consonne –w- entre voyelles (cava prononcé cawa).
La langue n’ayant plus la butée sur les incisives pour trouver son repère, toutes les consonnes alvéolaires ( = consonnes prononcées avec le bout de langue placée au niveau des alvéoles de la gencive située à l’arrière des incisives supérieures) deviennent facilement altérables. Pour éviter de se situer dans cette zone instable des incisives manquantes et retrouver une articulation plus stable, le mieux est de placer la langue un peu plus en arrière. Ce qui peut éviter également un sifflement intempestif dans le cas où une seule dent est manquante.
En conséquence :
  –nd- intervocalique : l’absence du clapet constitué par les incisives ne permet plus de prononcer facilement le d , d’où la réduction à –n- (landa > lana )
  –n- intervocalique, par le même processus, perd de sa sonorité et de sa nasalité, s’atténue et disparait (luna > lu ?a > lua ) ; la même évolution s’est faite parallèlement en basque (voir l’évolution des toponymes basques : http://www.xarnege.com/artikuluak/vascyrom.htm )
  géminée –nn- intervocalique, de manière analogue, se simplifie (annada prononcé anada),
  géminée –ll- du latin, se trouvant déstabilisée, passe à –r- lorsqu’il est en intervocalique (vitella > vetèra ), et passe à –th quand elle se retrouve en finale (vitellus > vetèth ),
  finales –lh , -nh sont articulées plus en arrière [ –y] , de même -tge tend à devenir [–tye] , à la différence du languedocien : [ -l , -n , djé/tché/dzé /tsé] ,
  finale –t a tendance à devenir –c (cantèt > cantèc),
  r apical (roulé du bout de la langue et doux à l’oreille) traditionnel des langues romanes non ibériques se trouve prononcé plus en arrière et donne une sonorité plus dure,
  groupe –iss- prononcé plus en arrière pour plus de stabilité, abouti à –sh- (pissare > pishar),
  groupe –ct- latin > -it (latin factu/-a > fait/-a , fèit/-a) ,caractéristique commune entre le gascon et une partie du languedocien (Aude, sud du Tarn,HG, T&G,L&G), [les autres domaines occitans donnant fach/-a], on évite ainsi l’implosive [ t ? ] percutant la langue contre les incisives.
Mais ce processus est loin d’expliquer toutes les caractéristiques de l’évolution de la phonologie du gascon : réduction de –mb- à –m- (camba > cama ), métathèse (= remontée) du r (praube), etc …

Pour avoir une idée physique plus concrète, vous pouvez essayer de simuler approximativement le cas où il ne reste qu’une seule incisive supérieure : plaquer un doigt sous une incisive supérieure, ce qui crée une fuite d’air. L’effet sur la prononciation est saisissant !

Mais ce modèle me parait un puzzle avec du jeu où les éléments s’emboitent trop facilement : il y a donc nécessité de le déconstruire ou le reconstruire différemment en faisant dialoguer « transversalement » des spécialistes de disciplines : ethnologues, orthophonistes, linguistes.

Note du webmèste :
Le texte ci-dessus n’a pas pu conserver les caractères phonétiques du texte original et les a transformés en " ?" (au moins trois occurrences). Vous pouvez vous reporter au document joint ci-dessous, qui est l’original.

Une hypothèse expliquant l’évolution phonologique du Gascon
Andriu d’Agenés
Télécharger (20.8 ko)

Grans de sau

  • Nous avions aussi lu, sous la plume de Dauzat je crois, que le passage de F à H était dû au fait que les "Ibères" étaient prognathes. Dans le même genre, les noirs ont un gros pénis et courent vite.
    Mon Dieu !

  • Les phénomènes de transition linguistique dans les situations d’acculturation ne manquent pas dans le monde d’aujourd’hui. Nous en avons autour de nous de nombreux exemples.

    Dans la question soulevée, celle du rapport entre physiologie (articulatoire) et système de la langue (phonologie), nous tenons pour ainsi dire les deux bouts de la chaîne.
    Il est malaisé de poser en premier la seule contrainte naturelle (plus ou moins grande et mesurable selon les groupes) ou la contrainte culturelle (puisqu’elle repose en partie sur la capacité à imiter). L’usage d’une langue fait intervenir la conscience des locuteurs, la notion de correction, les nécessités de la communication, etc.

    Faire l’inventaire de similitudes parallèles et systématiques entre les deux langues basque et gascon (ou aquitain) peut donc révéler les déterminations phonétiques dues à la physiologie et celles que dictait la langue d’accueil.

    Quelques remarques :

    1) Pour qu’un son étranger soit bien perçu, il faut théoriquement qu’il fasse déjà partie du système phonétique de la langue réceptrice. Mais s’il n’a pas de statut phonologique dans la langue d’accueil, il ne sera pas perçu nettement : si l’"aquitain" n’avait pas de phonème //f//, c’était déjà un obstacle à la capacité reproductrice des Vascons.
    Phonétique : le français admet plusieurs réalisations pour ce qui est le phonème //r// ("roulé", apical, grasseyé ou "parisien") et cela ne gêne pas trop la compréhension. D’autres langues opposent en tant que phonèmes plusieurs sons qui pour des francophones se résument à "des r" mais qui distinguent des mots.

    2) Les Vascons auraient sans doute pu adopter et conserver le /f/ mais ne le percevaient pas distinct. À ce niveau d’interprétation c’est une question d’intégration dans le système de la langue plus que d’appareil phonateur.

    3) Toutefois, la physiologie détermine aussi les emprunts, d’où des accents irréductibles : il faudrait un remodelage physiologique précoce pour "rééduquer" les locuteurs. C’est inévitable pour des acculturations au plus éloigné (langue française en Afrique noire, en Asie, et réciproquement pour ceux qui ont essayé de prononcer "correctement" du chinois ou de l’arabe : l’effort est d’autant plus grand qu’il faut discriminer des sons mais aussi les fonctions qui s’y attachent).

    4) Un beau parallélisme est la prostase : er-, ar-, qui semble relever d’une constante phonologique forte. La nécessité de prendre un appui vocalique avant d’émettre un r paraît ici outrepasser la seule nécessité syntaxique (préserver le mot).

    5) On peut supposer que ni /f/ ni /v/ latins tardifs ne faisaient partie de la phonologie vasconne à cette période de la langue (langue dont nous ne pouvons suivre l’histoire sur trois millénaires).

    6) v et f, qui sont des fricatives (ça frotte) labio-dentales (lèvres + dents) respectivement sonore (ça vibre sur les cordes vocales) et sourde (ça ne vibre pas), ont un caractère commun avec le /h/ : le passage continu d’un souffle. Elles sont d’une grande instabilité parce que soumise au moindre relâchement de l’articulation. Par paresse articulatoire elles se réduisent facilement au souffle /h/. Mais elles peuvent aussi, pour les nécessités de la distinction, se maintenir et se renforcer. Si b et w ont tendu à se confondre, c’est qu’il y avait une impossibilité, ou une absence de nécessité, à distinguer les deux (ce n’est pas propre au vascon, le grec fit de même, et le celtique aussi, mais à des époques bien plus hautes).
    N. B. En roman d’oïl même, des f germaniques entre voyelles sont "tombés", mais ce fut marginal et n’entre pas dans le système du français. Quand au th de l’anglais il est perçu comme /z/ (le français ignorant le /h/).

    7) De tels phénomènes surviennent dans l’histoire de toutes les langues. L’initiale du nom des wascones, bascones, gascones, montre les aléas phonétiques sur une brève période.

    Mais ce qui frappe avec le gascon c’est le maintien du système d’opposition du latin, langue apprise, à travers un renouvellement des formes. f > h et w> b ou w ne se sont pas fondus, le système n’a pas été déséquilibré. Ces deux évolutions furent-elles rigoureusement parallèles ? A la phonétique historique de tenter une réponse.
    Ce qui est aussi mis en valeur c’est la communauté avec le basque, par l’intermédiaire d’un état d’une langue L qu’on peut appeler aquitain, vieux- basque, vascon commun...

    8) Les vieilles édentées : pittoresque mais pas vraisemblable. Toutes ne l’étaient sans doute pas, et tout le système phonétique en aurait subi les conséquences, à commencer par le terrible r "roulé" et le délicat r apical de nos vielles générations, et peut-être aussi l’énergique h qui demande de bons soufflets.

    9) Il faut aussi s’enquérir de la qualité du latin d’Aquitaine, qui variait évidemment selon le diffuseur. Le latin des juges n’était pas celui des soldats, ni ce que deviendra le latin des évêques et des évangélisateurs.

    10) Un changement de langue modifiera-t-il la physiologie ? Le jour où les Espagnols prononceront distinctement (du point de vue des autres) les s et quand ils parleront moins vite, seront-ils encore des Castillans ? La mort des accents et de ce qui les conditionne est aussi celle des peuples. Et aujourd’hui yalatelé.

    Votre conclusion, Andriu, rejoint ce qui a été dit sur d’autres hiu de discussion : un dialogue "transversal" doit s’instaurer.

  • Je suppose qu’Andriu d’Agenés est un occitaniste pur sucre. Relayer de telles inepties. Ils ne savent plus quoi inventer pour essayer de réduire le particularisme gascon à des trivialités sans importance. On peut simplement leur objecter que, dans la mesure où dans la plupart des groupes humains ces remarques sont valables, on doit se demander comment TOUS les peuples n’ont pas les mêmes problèmes avec les mêmes phonèmes.

  • Occitaniste,Andriu ? Nous n’en savons rien et peut-être ne mérite-t-il pas un tel soupçon ( (on se battrait en duel pour moins que cette insulte suprême).Je parierais plutôt pour dentiste ou orthodontiste.Mais il est vrai que les premiers ont dans l’usage populaire la réputation de mentir tout le temps ,ça peut donc s’accorder,n’est-ce pas ?
    En tous cas son intéressante hypothèse me parait peu vraisemblable (ne serait-ce que parce que le mécanisme d’apprentissage des langues ne semble pas se faire auprès des seuls aieux sauf à imaginer des parents-couples de chasseurs absents des mois durant du foyer ...) mais elle a le mérite d’attirer notre attention vers ce qu’ont d’irréductible certaines manières ataviques de prononcer ,même en des langues différentes à travers les siècles.PJM a finement détaillé combien la physiologie peut être déterminante mais nous ne savons pas à travers quels mécanismes précis .

  • Complément :
    C’est parce que tous les peuples n’ont pas les mêmes phonèmes, ni d’ailleurs les mêmes sons, qu’il n’y a de phonèmes que relativement à un système donné, et que les langues sont d’autant moins réductibles les unes aux autres qu’elles ne sont pas apparentées. Toutefois une ancienne communauté de langue et/ou de peuplement peut ressortir à l’intérieur d’une aire linguistique ( = de langues non apparentées, théories débattues).

    La question du rapport entre appareil phonique et formation des systèmes des sons et des phonèmes n’est pas dépourvue de sens. Elle a trait aux conditions, à la genèse et au maintien des spécificités sur le long terme.

  • 1- à M. : Pas de propos vulgaires SVP. Il n’y a rien de racial dans ce que je voulais faire passer !
    2- à PJMo : Je suis d’accord avec les explications claires que vous donnez. Tout ceci se passe pendant la période de plusieurs générations où la nouvelle langue – le latin populaire- s’introduit successivement dans les différentes classes sociales jusqu’à éliminer l’ancienne langue. Cette langue de substrat ne peut laisser son empreinte que pendant cette période de bilinguisme qui a pu durer quelques siècles. Il faut que le proto-Gascon ait acquis ses spécificités pendant cette période pour être l’héritier de l’ancienne langue. Ce sont les adaptations des sons que vous décrivez parfaitement.
    Aux périodes suivantes, les évolutions sont dues à d’autres causes endogènes et à des contacts avec d’autres peuples.
    La question cruciale est donc de savoir à quelle période chacune des caractéristiques phonologiques originales du Gascon sont apparues.
    Pour en revenir à mon hypothèse, il faut se placer dans le contexte de communautés vivant dans des vallées montagneuses où la langue parlée n’a pas la même force d’inertie que dans les plaines plus peuplées. Ensuite ces populations vivant dans des conditions difficiles, dont la nourriture pouvait ne pas être suffisante ou adaptée, pouvaient facilement avoir des pathologies dentaires : voir : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bmsap_0037-8984_1958_num_9_10_2732. (le paragraphe 4 « les dents » a seul de l’intérêt) même si le XV° siècle n’est pas le Haut-Moyen-Âge.

  • Que vèn mè que ridicule aqueth tèrme "occitaniste" com ua ensurta... Com s’èra tot clar, los braves contra los maishants, los gascons contra los occitans, etc...
    Que’m carré definir çò qu’es un "occitaniste"...
    Ne compreni pas perqué les gènts que son tan sectàrias... Qu’es l’un bòrd o l’aut, tostèm. E ne seré pas un mau francés aquò, lo bipartisme, au hons ?

  • A Renaud.

    Il est vrai que "occitaniste" est de plus en plus ridicule. Nous sommes bien d’accord.
    Des nuisibles.

  • Oui Renaud, ici c’est hors de propos.
    Concentrons-nous sur le sujet : nous trouvons des exemples très simples d’adaptation dans le passage du gascon au français :

    1) perte du /r/ "roulé"
    2) besoin occasionnel d’un es d’appui "C’est espécial"
    3) difficulté à prononcer le sl initial : ’zlip"
    4) difficulté à rendre le eu dans bleu, etc.
    5) conservation des e muets en oïl
    6) sans parler de la mélodie de phrase, du vocabulaire, de l’usage du passé simple et du PQP...
    7) persistance de suffixes "tout tranquillot"
    8) maintien du /h/ : "du haché" "j’ai honte"

    Et cela s’enfuit maintenant aussi...

  • En effet, Tederic.
    Il y a sur ce site des fils de discussions qui permettent de réfléchir sur le bien-fondé de telle ou telle notion.
    On peut même exposer des points de vue très opposés, mais les mouvements d’humeur sans humour et hors-sujet ne bénéficient à personne . Ils sont même puissamment démotivants .

    Les sujets proposés par tel ou tel de nos amis (parce que venir sur ce site et y apporter quelque chose, c’est a priori amical) participent à la construction d’une sorte de réseau "Gascogne". Ne gâtez pas la sauce.
    Ce qui compte, c’est ce que les lecteurs tirent de nos réflexions, et ce que nous en retirons nous-mêmes. Je ne fais pas d’angélisme, mais n’embrayerai pas ici sur la Nième discussion sur l’occitanisme : ce n’est pas le bon fil. Et puis je me méfie des -ismes.

    Pour revenir au sujet et remonter au presque début de ce hiu, Paul a fait état de stéréotypes comme il en court chez tous les peuples, et de quelques raccourcis de Dauzat (Rostaing, qui voit du "pré-indo-européen" partout, a fait bien pire). Enfin, chaque époque a ses bizarreries (on n’en est pas au degré Chasle - Vrain Lucas).

    De tels raccourcis ne disqualifient pas l’hypothèse d’une détermination physiologique de la phonation. L’anthropologie physique, l’ostéologie, la paléobotanique qui renseigne sur les régimes alimentaires du passé, ne sont pas triviales (pas plus que la chirurgie qui répare et guérit) mais concourent aussi à la définition des populations, au même titre que l’histoire des religions, l’étude des milieux et des sociétés, et il n’y a pas à en refuser l’apport à condition de relativiser les informations pour établir un portrait le plus juste possible de ce qu’on décrit.

    Une hypothèse : la perte des dents étant en rapport avec la consommation d’eau de vie, on pourrait croiser le chiffre d’affaires des dentistes avec celui des distillateurs et bouilleurs de cru et reporter le tout sur l’Atlas linguistique de la France. Même chose avec l’ALG. Beau sujet de thèse pour une université occi... Bibòste, ma langue a failli fourcher ! occi... dentale bien sûr, puisque c’est de rigueur.

    Et en plus il est tard ! Boune noèyt, bona nut.

  • Je ne suis ni linguiste, ni dentiste, ni même le cheval de Troie venant d’un pays étranger. J’ai seulement été frappé par une causalité possible. Maintenant je me tais. Pour voir le vrai langage de linguistes, par ex. http://tipirena.net/Tipirena_-_Site_officiel_de_Jean-Baptiste_ORPUSTAN/I._Linguistique_et_lexicographie_basques_files/languebasquemedievale.pdf. , il ont une formation que je n’ai pas.

  • On trouve dans l’ouvrage "Estudio sobre la onomástica indígena de Aquitania" de J. Gorrochategui l’analyse d’une inscription antique retrouvée à Saint-Béat (Comminges) :

    GOMFERANI

    Cette inscription est aberrante car elle comporte deux phonèmes absents de l’ancien aquitain : /m/ et /f/.

    Les divers auteurs qui ont analysé cette inscription s’accordent à y voir un emprunt au latin, un collectif "Conferani", sur confero, autrement dit une assemblée de gens se réunissant.

    Le terme latin aurait donc subi deux mutations :

     La sonorisation de la consonne sourde initiale c, comme dans tous les emprunts du basque au latin.

     L’adaptation du son /f/ : la présence de la bilabiale m avant f tend à faire la preuve que ce f était prononcé de façon bilabiale, en termes plus concrets, tendant vers b.

    C’est comme par hasard l’évolution classique des emprunts anciens du basque au latin : boronde "front", du latin frontem.

    Tout ceci pour dire quoi ? Que la répugnance pour le f est déjà dans l’ancien aquitain. Qu’elle s’inscrit vraisemblablement dans un phénomène plus vaste de répugnance des labio-dentales (v et f) comme précédemment indiqué.

    Pourquoi cette répugnance ? Impossible à savoir, sauf à dire que l’ancien aquitain ne devait pas connaître ces sons. La répugnance pour ces sons se poursuivra en gascon, langue néo-latine, au point que Pierre Bec dans les années 50 constate que le terme pourtant banal de café a été adapté cahé en gascon du Couserans.

    Pour quelle raison l’ancien aquitain n’avait-il pas ces sons ? Nous ne le saurons jamais car cela nous plonge dans un monde dont nous ne savons rien, celui de l’ancienne langue de l’Europe occidentale, avant l’arrivée des langues indo-européennes.

    Le plus surprenant, à mon sens, c’est le maintien des répugnances malgré la substitution linguistique, la force du substrat dans la façon d’articuler, d’accentuer, de dire.

  • "Le plus surprenant, à mon sens, c’est le maintien des répugnances malgré la substitution linguistique, la force du substrat dans la façon d’articuler, d’accentuer, de dire."

    Je me demande souvent... combien de temps, et de quelle façon, la vieille langue a coexisté avec le latin puis le roman ? Une génération ? Des siècles ? Dans la montagne, la lande, les coteaux ?
    Et pourquoi pas un bon millénaire par endroits ou dans certains milieux ? C’est bien l’histoire du pays basque...

    Une durée conséquente expliquerait beaucoup de choses.

  • Il n’est pas phonétique plutôt syntaxique mais c’est peut-être un trait qui vient de loin :

    Il y a quelques mois au cours d’une discussion au moment de me prononcer sur la performance de je ne sais plus quoi j’ai dit :
    "Efficace, c’est !"
    Sans y faire gaffe. Et bé j’ai pas pu enchaîner la phrase d’après. Parce que me trouvant loin de ma vallée où ce genre de tournure a cours, la plupart des gens avec qui j’étais ont détourné la conversation. Ils se sont mis à imiter Yoda (un personnage de la Guerre des Etoiles qui parle en mettant le verbe systématiquement à la fin).
    Sauf que je n’avais pas voulu faire de blague, et que ça venait pas d’une autre planète mais bien de chez nous.

    Du coup j’ai percuté que mon français était ici calqué sur le patois. Ex : "barrat key" c’est fermé.
    Et que cette tournure est surprenante en français comme en espagnol (dans les langues d’oc qu’en est-il ?) mais parfaitement correcte et courante en basque. Comme par hasard.

  • =) 9

    1) perte du /r/ "roulé"

    Le /r/ gascon est (ou était) apical ou grasseyé ?

  • Il y avait un r apical mais
    1) monobattement (pas toujours distinct du l, ce qui pourrait expliquer une certaine instabilité l/r ) ;
    2) fort ("roulé"), rrrr...
    Ainsi qu’un r vélaire (un peu raclé) aussi.

    Y avait-il des r grasseyés ? Un tel r semble avoir rayonné à partir du français de Paris (spécialement des milieux populaires). L’école a fait le reste.
    "Rouler les r" comme autrefois le phonéticien Pr Claude Régnier ou Arthur Conte, c’est d’un ridicule...

    Pub télé pour les produits Delpeyrat : un indigène du S-O avec l’accent et tout, qui prononce bien son /dèlpèra/. Terminé.

  • =)17
    Merci pour la réponse.
    Par r grasseyé, j’entendais plutôt r vélaire.

    Quand j’écoute du gascon (1er leçon hum de calhau) j’ai l’impression qu’il s’agit d’un R vélaire plutôt que du R castillan.

    Je n’ai pas le souvenir que mes parents et surtout grand parents qui parlaient gascon roulaient les R. Mais un voisin de leur age lui roulait les R

  • Le changement dans la prononciation du R, et l’évolution des accents avaient déjà été évoqués sur Gasconha.com :
    http://gasconha.com/spip.php?article1240


Un gran de sau ?

(connexion facultative)

  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Ajouter un document

Dans la même rubrique :


 

Sommaire Noms & Lòcs