- Tederic Merger

drolh

français : chêne roure ou lanugineux

Prononcer "drouil".
« droulh : Chêne roure (quercus robur) et chêne lanugineux (quercus pubescens). » [Palay]
Multidiccionari francés-occitan

Le gran de sau ci-dessous de Danièl situe ce mot dans une lignée pré-indo-européenne :

Dans certains coins du Béarn, Bonnut par exemple, lo drolh était l’un des deux noms donnés au chêne taillé en têtard, l’autre étant cogoish. Un groupe de chênes taillés de cette façon était un drolhet, d’où vraisemblablement le patronyme Drouilhet .
En Guyenne on utilisait les mots drolh/druelh/drulh pour désigner l’alisier.
On retrouve sous ces termes la racine pré-indo-européenne deru / dóru , signifiant primitivement "ferme, solide", et ultérieurement "chêne" (l’arbre par excellence à cette époque lointaine) et ensuite par extension "arbre", et qui a donné en latin duru(m) , "dur, solide (comme un arbre)", en grec ancien drys , "chêne", en anglais tree , "arbre", en allemand treu , primitivement "solide, résistant, épais", et de nos jours "fidèle", et en français les mots "druide, dryade, dur, dru".

Remarques :
 L’alisier et le chêne appartiennent à des familles bien distinctes.
 Pour l’adjectif droulh, Palay donne curieusement une définition qui est à l’opposé de la dureté : « Qui n’a pas de résistance ; qui manque de vigueur, d’énergie ; se dit aussi d’un bois qui casse facilement- : huste droulhe, bois mou. »

dérivé (qu’on trouve en onomastique gasconne) : drolhet ("Drouilhet"...), sans doute un bois planté de l’espèce d’arbres considérée


 

Grans de sau

  • Maintenant mettons nous à la place de tout nouvel apprenant (sans nous en exclure d’ailleurs) qui se demandera quand et pour quel type d’arbre employer le mot "drolh" (un beau mot,antique et authentique à ne pas laisser perdre si possible) ?
    Sera-ce pour n’importe quel chêne rouvre (comme le préconise le dictionnaire Per Noste à côté de "roire") ou seulement le chêne taillé en tétard (un dessin serait utile ; dans mon coin les chênes ne sont qu’exceptionnellement taillé -en maintenant le tronc à basse hauteur et en laissant développer au dessus un tas de branches fines comme plus souvent pour les érables de bords de routes) ? Ou autre chose ? Vous voyez où je veux en venir une fois de plus : une normalisation (un vilain mot,certes !) du gascon est nécessaire.

  • Première remarque : Palay fait erreur car le chêne rouvre (syn. chêne sessile) est Quercus petraea, absent du plateau landais (mais commun dans l’Entre-deux-Mers, par exemple), alors que Quercus robur est le chêne pédonculé, commun partout sauf sur les plateaux calcaires. Sur les plateaux calcaires , et ailleurs dans les lieux ensoleillés, on a le chêne pubescent Quercus pubescens.

    Si l’on a une approche plus large que gasconne, on s’aperçoit que les mots issus de *derua ne se répartissent pas plus clairement qu’en gascon : par exemple, en Saintonge et dans le centre de la France, une drouille est un chêne blanc, c’est-à-dire pubescent (mais on l’appelle aussi... chêne noir en raison de la couleur sombre de son écorce ! vous voyez le bazar). Par contre, dans le centre également, un dreuillard est un chêne rouvre.

    Pour les mots du domaine d’oc, il est relevé drolh/drulh en Provence, casse drolh en Bas Quercy, drolhet pour un petit chêne en Périgord, drolh dans les Landes (et en Albret, drolha pour le gland de ce chêne). C’est sans aucun doute en continuité avec ce dernier que Guy Dussaussois relève drolh dans le Bazadais, si ma mémoire est bonne (je vérifie ce soir en rentrant) pour désigner le chêne rouvre, appelé par ailleurs...casse negre/negue !

    Reste à creuser l’histoire des chênes têtards. Cela devait être une pratique très localisée.

    Dans une optique de normalisation, nous pouvons donc proposer :
     CHENE PEDONCULE (Quercus robur), ou CHENE en général : casse/casso/cassi, et agland pour son gland ;
     CHENE ROUVRE ou SESSILE (Quercus petraea) : casse negre / drolh, et drolha pour son gland ;
     CHENE PUBESCENT (Quercus pubescens) : casse blanc ;
     CHENE TAUZIN (Quercus pyrenaica) : tausin, et tausia pour son gland ;
     CHENE VERT (Quercus ilex) : casse verd / euse ;
     CHENE-LIEGE (Quercus suber) : leugè(i)r / surrè(i)r, et surra pour son gland.

    Remarque - Précisons que, selon le FEW, les mots semblables qui signifient "alisier" viennent d’une autre racine, elle aussi celtique, *dercos.

  • Merci Gaby pour cette réponse complète et très constructive (quoi que j ai du mal à suivre le botaniste dans les premiers paragraphes).
    Je fais miennes tes préconisations... Mais aurais besoin d’un bon stage en forêts pour bien memoriser les différents types de chêne !

  • Tout le plaisir est pour moi ! J’ai d’ailleurs l’intention de rédiger un article plus complet sur ces histoires de chênes.

  • Bonjour, je lis "euse" pour le chêne vert en gascon, est-ce que cela correspondrait au mot français "yeuse" mot tellement mystérieux quand on traduisait le mot "ilex" dans les Bucoliques de Virgile et "qu’on pompait la tradale !!!" sur une édition bilingue !
    Je me suis toujours demandé ce que cela pouvait être.

  • C’est bien ça oui. Yeuse n’est autre qu’une francisation du mot occitan euse - sauf erreur l’arbre ne pousse pas spontanément dans les régions de langue d’oïl, sauf dans les Charentes mais elles étaient d’oc auparavant. On trouve d’ailleurs le mot ’’eusine’’ en saintongeais.

  • Le vent ride sous l’yeuse, le sombre miroir des eaux....
    Victor Hugo (une flûte invisible)

  • Drolh me fait penser à une évolution de DERVULUS ou DERVOLOS qui signifierait "petit chêne" en gaulois.

    Voir en ligne : http://www.dictionaric.com


Un gran de sau ?

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