Gascogne toulousaine Languedoc voisin Anneau gascon

Toulouse

- Vincent P.


 

Rue du Férétra / Carrièra del Feletrar (l) / Carrèra deu Feretrar (g)


Ce que j’ai pu écrire par ailleurs : "Empalot est l’ancien terroir du Férétra" (Empalot originellement est sur l’île du Ramier) où de nombreux puits funéraires ont été trouvés.
Première attestation en 1120 : "de turre Folletaria" puis "Faletrare" tout au long du XIIème siècle. Difficile de trouver un sens à ce terme latin qui désigne une tour (on a proposé falere qui a le sens de pilier), en tout cas, si les deux "ll" de la première attestation sont étymologiques, alors Férétra est une forme gasconne rive droite de la Garonne."

J’ajoute aujourd’hui que les attestations anciennes sont : "Feletrar". Qu’importe au fond la relation avec "Folletaria", ce qui est certain, c’est que l’alternance entre le l simple des attestations anciennes et le r moderne, dans un contexte si proche de la rive gauche de la Garonne, gasconnante, indique un étymon avec ll.
Et en tout cas, "Le Férétra" semble une trace de gasconnisme sur la rive droite de la Garonne, on peut en détecter d’autres.


 

Grans de sau

  • A part ça, c’est une rue intéressante architecturalement parlant, avec ce qui semble être une église désaffectée sur la droite, des restes de toulousaines noyées dans les immeubles des années 60 qui annoncent Empalot et surtout, on ne le voit pas sur la photo, des immeubles Art Déco années 30, dans le style new-yorkais, qui semblent indiquer que le quartier n’a pas toujours été "populaire" mais a été l’objet d’une tentative précoce de gentrification.

  • Pour revenir au passage de -ll- intervocalique à -r- sur la rive droite de la Garonne, je crois très probable que le phénomène a connu une extension plus grande qu’actuellement et débordait la rive droite de la Garonne dès la sortie de Toulouse au Sud (là d’ailleurs où commencent les isoglosses méridionales comme le chuintement de -iss- en -(i)sh- vers Vieille-Toulouse) puisque l’on peut détecter de telles formations isolées jusqu’à vers Espanès à l’Est, donc dans les coteaux entre Ariège et l’Hers Mort.

  • Maintenant, il existe des cas de rhotacisme en languedocien.
    Le plus connu est la forme que prend le latin castellare en languedocien : Castéla certes, mais réduit à Castla qui devient Carla. Mais c’est un phénomène qui n’est pas en rapport.

    On trouve en gallo-roman des exemples de passage de -ll- à -r-, par exemple vallicula "petite vallée" qui donne immuablement dans de nombreuses régions de France "Vareille" ou "Varille" (cf Varilhes dans la vallée de l’Ariège).
    Mais comme le phénomène est généralisé, il faut en déduire qu’il s’agit d’une mutation qui date de la basse latinité.

    A mon sens, on ne peut faire l’impasse que le Férétra n’était pas un quartier très urbanisé avant le XIXème siècle, qu’il se situait somme toute relativement loin du centre de Toulouse, et qu’étant si proche des pays gascons de la rive gauche de la Garonne et de l’Ariège (qui matérialise la frontière à Pins-Justaret), il a pu aisément connaître une langue populaire des paysans des lieux influencée par le gascon, voire gasconne.
    Peut-être aussi que ce quartier attirait une population gasconne en provenance du Bas-Comminges (seule source majeure gasconne de peuplement de la ville avant les migrations ferroviaires, la ville de Toulouse a été peuplée traditionnellement de gens du Lauragais et du Toulousain).
    On trouve des patronymes de familles attestées depuis le XIIème siècle sur la paroisse de Saint-Michel, j’en ferai une analyse.


    NB : Il faudrait ajouter (g) après la version gasconne du toponyme.

  • Sujet très intéressant où il y a beaucoup de choses à dire.

    D’après Alex Coutet : « Aux portes de la ville, les gallo-romains, comme c’était la coutume, avait établi leur cimetière… tous les ans, au retour du printemps, aux calendes de mars, étaient célébrées en ce lieu, les fêtes en l’honneur des morts. Ce furent les Feretralias, appellation dérivée de Feretrum, litière sur laquelle on portait les morts, mot devenu lui-même, par corruption, en roman et en langue d’Oc, Feretra et Fenetra. »
    Je ne sais pas quelles sont ses sources mais :
    1) Notons qu’en latin les fêtes s’appelaient plutôt Feretralia, qui est un pluriel.
    2) effectivement le quartier St Roch-Férétra est occupé depuis l’époque gauloise. Après la fondation de la ville romaine de Toulouse plus au nord, la route menant vers Narbonne depuis les portes de la ville (Palais de Justice actuel) s’est donc vu bordée de tombes. L’archéologie nous le confirme. Le nom du quartier et de la rue peut donc dater de cette époque.
    3) Problème, d’après Marc Miguet le nom Férétra dériverait de Jupiter Feretrius, divinité romaine dont les romains avaient édifié un temple à la fourche des rues St Roch et Férétra. Temple dont l’existence est avérée et devenu l’actuelle chapelle Saint-Roch-du-Férétra.
    4) Donc une évolution de Feretralia vers Férétra ? Ou est-il plus pausible de voir une évolution de Feretrius vers Férétra ? Ou directement de feretrum (nom commun à la fois racine de Feretralia et de Feretrius) vers Férétra ? Et à quelle époque, latine ou occitane ?
    5) Quid de Feletrar mentionné dans l’article ci-dessus par Vincent P. ? Est-ce plus plausible ?
    6) Si la rue s’appelle Férétra, la fête associée au quartier depuis le Moyen Age (ainsi que le gâteau) s’appelle de préférence Fénétra.
    L’évolution en occitan de Férétra vers Fénétra ? logique ou pas ?

  • Le TDF va dans le sens de fenetra, voir tome 1 p. 1118.
    — 
    J’explorerais quand même le lat. pharetra (carquois), *pharetrāre → archerie (en tant qu’industrie, ou lieu où des réserves de flèches étaient entreposées — encore un suffixe -ar non botanique)… ?
    ancien français : pharetre, s. f., carquois. - pharetré, adj., qui porte un carquois.
    Ce serait alors (tor deu) *faretrar, avec le premier -a- atone réalisé [ə], fréquent voire régulier.
    (L’ll pourrait être une hypercorrection languedocienne, ou simplement une réalisation de l’r apical : ça arrive. Ce serait alors l’-r- qui est étymologique…)
    — 
    Voir
     https://www.lexilogos.com/latin/gaffiot.php?q=pharetra
     https://apps.atilf.fr/lecteurFEW/index.php/page/lire/e/194120 (FEW vol. 8 p. 366)


Un gran de sau ?

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