J’ai lu ou relu récemment les deux tomes de "la Vasconie" de l’historien souletin Jean de Jaurgain qui écrivait avant 1900 et le livre que, 100 ans après, l’historienne des Goths,des Mérovingiens et des Carolingiens, Renée Mussot-Goulard prétendait consacrer aux Gascons ("Les Gascons", éd.Atlantica,2002).
Sur le plan factuel, l’histoire des Aquitains/Gascons des VIè au IXè siècle, aux prises avec les grandes puissances du moment, y est bien rappelée et ce livre est fort intéressant.
Reste qu’il me parait représenter à un autre niveau un hold-up historique un peu fort : se fondant sur un "anonyme de Ravenne" (en Italie) de la fin du VIIè siècle (voir pp 9 et 253), l’historienne reprend ce qui me parait un gigantesque anachronisme du "ravennate" qui voyait naitre une "Gascogne" dès le VIè siècle sur l’ensemble de ces territoires ; elle étend le nom de Gascogne à l’immense territoire entre Loire et Pyrénées (les Aquitaine première et seconde d’Auguste).
Ce tour de passe-passe lui permet de raconter, non l’histoire d’un peuple particulier appelé "Wascones" surtout présent au sud de la Garonne - qu’elle ne mentionne même pas à titre d’hypothèse - mais bien la résistance visigothe à la mainmise franque après que la victoire franque à Vouillé (511) les eût chassé de ces territoires.
Du reste, RMG ne mentionne rien d’autre que sa thèse assez partielle et partiale et jamais, même dans sa bibliographie, tous ceux qui écrivirent avant elle sur le Haut moyen âge aquitain et gascon.
Je ne sais si ce livre avait été beaucoup discuté à l’époque de sa parution ; j’ai trouvé toutefois une critique modérée mais claire et bien avisée dans un site basque (Ikerzaleak) sous la plume de Robert Elissondo ("avons-nous des ancêtres goths ?").
Derrière cette thèse outrancière, une question se profile tout de même :
qu’est-ce qui dans notre héritage génétique, culturel, linguistique mais aussi paysager et social, vient respectivemet des quelque 30 peuples "novempopulaniens" (considérés souvent comme "ibères" (les "Aquitains" de Jules César dans les Commentaires), des Goths (qui ont certes laissé leur empreinte) et des "Wascones" que tous s’accordent à voir venir de la zone cantabrique ?
Pour ma part, je subodore que l’influence des premiers nommés, pourtant occupants nombreux et établis de très longue date, a été au fil des temps très sous-estimés au bénéfice des "Wascones" et, avec Mme Mussot-Goulard (bien seule,il est vrai !) des Goths.