Ua Generalitat de Gasconha ? Tederic M.

- Tederic Merger

Alain Juppé, oct. 2014, aqui.fr :
« Je suis favorable à la décentralisation, mais l’avenir n’est pas au fédéralisme. On ne veut pas devenir une nouvelle Generalitat de Catalogne. »

Qui ça, "on" ? Au nom de qui parle Alain Juppé ? Au nom de Bordeaux ? Toujours cette confusion métropole-région...
Quant au refus d’être une "Generalitat", on reconnait le jacobinisme foncier du maire de Bordeaux, déjà exprimé dans le débat sur la refonte régionale : il fait une critique archéo-jacobine de cette réforme, il y voit en germe l’éclatement de la France.

En contrepoint, Bernard Lusset, adjoint au maire d’Agen, et initiateur de la pétition Soyez les fondateurs de la grande région Sud Ouest :
« Pour Aquitaine et Midi-Pyrénées, le temps est à l’audace et à l’ambition. Pas à la sauvegarde des baronnies locales ! Il appartient aux habitants des deux régions d’exprimer avec force leur volonté de construire en Gascogne une "Catalogne à la française". »

Grans de sau

  • Je crois surtout qu’on ne peut pas ... Les esprits ne sont pas tout à fait mûrs pour prendre en charge de larges pans de l’action jusqu’ici étatique, le débat politique dans le SO (je ne parle pas de Gascogne par réalisme) n’est qu’une annexe du débat national.

    Font probablement exception les vallées montagnardes qui ont conservé des structures de coopération poussée et des réflexes distincts de la plaine.

    Pour le reste, il ne faut certainement pas miser sur un pur produit de l’énarchie française qui vise la fonction suprême, quand bien même ledit produit aurait conservé une pointe d’accent ou aurait ses habitudes sur la côte landaise, pour insuffler quelque chose de nouveau.

    Il y a probablement plus de possibilités du côté du personnel politique béarnais, en "Bayrouïe", ou ailleurs peut-être même, il faut déceler ces foyers potentiels de discours anti-jacobin.

  • Les propos de Juppé sur Aqui sont du reste intérprétables de plusieurs façons et ne me paraissent pas limpides:interrogé sur la réforme régionale et la "grande région" APChL,il répond"c’est du grand n’importe quoi,on ne sait pas òu on va "(j’ai repris à mon compte ces propos dans un commentaire à Aqui) ...le temps n’est pas au fédéralisme,on ne veut pas,etc...".Comme si l’Arregionasse risquait de devenir,on ne sait comment,une "Catalogne" française (la Catalogne est ce qu’elle est parce qu’elle est homogène du moins territorialement ,avec APChL,aucun risque ...).
    Cela dit ,la référence explicite de B.Lusset à la Catalogne est discutable tactiquement à l’heure où le gouvernement de la Généralité cherche à imposer son curieux "réferendum"(c’en est un sans l’être mais enfin,si tout de même ...) sur l’indépendance de la région :de quoi faire frémir le moins jacobin des politiciens français !

  • J’espère que Juppé n’imagine pas que c’est le fait d’accrocher à l’Aquitaine le Limousin et Poitou-Charentes (créant au passage, la région la plus biscornue de France) pour constituer une grosse région qui crée une "Generalitat" potentielle.

    Parce que la Catalogne, ce sont 31 950 km2, et que l’Aquitaine administrative, ce sont déjà 41 308 km2 ...

    Au passage, il suffit de s’en tenir à cette statistique pour rire aux nez des jacobins français, mais peut-être en trouvera-t-on pour dire que la Catalogne espagnole n’est pas suffisamment grande, donc pas susceptible de créer des richesses.

  • Gérard : on ne nous a imposé rien, on votera demain si l´on veut.
    Autrement dit : des Madrid on nous a imposé de n´avoir aucune autre chance que de faire cet curieux referendum (mais c´est encore plus curieux de voir que ceux qui d´abord ont essayé de le ridiculiser, puis ont cherché a l´annuler).
    De toute façon, je comprends bien ce que tu dis au sujet de la manque de "tacticisme" (je ne sais pas si on dit comme ça en français) : peut-être ce n´est pas le mieux moment pour se comparer à la Catalogne, mais si j´ai bien lu ça fait un peu de temps que Lusset a fait sa pétition.
    Salutacions, llegeixo sempre amb interès les vostres intervencions.

    Voir en ligne : http://elpetitespolit.blogspot.com.es/

  • La pétition de B. Lusset date de juillet dernier. D’où mon doute sur l’interêt tactique de la référence catalane.
    Molt agrait per el seu interes per gasconha.com.

  • gràcies ;-)

    Vincent a écrit :"J’espère que Juppé n’imagine pas que c’est le fait d’accrocher à l’Aquitaine le Limousin et Poitou-Charentes (créant au passage, la région la plus biscornue de France) pour constituer une grosse région qui crée une "Generalitat" potentielle.
    Parce que la Catalogne, ce sont 31 950 km2, et que l’Aquitaine administrative, ce sont déjà 41 308 km2 ..."

    on dirait qu´il y a des gens qui raisonnent comme ça ; voici ce qu´a comenté un lecteur dans un journal français, au sujet du referendum catalan :

    "c’est pourtant ce que veux l’Europe, le fédéralisme pour détruire les états et c’est ce que veut faire Hollande avec ses " grosses " régions !"

  • Hou là là, avant de me dire merci, il faudrait savoir ma position sur la Catalogne !

    Je dois dire, en toute amitié pour les Catalans, que leur posture maximaliste et plaintive depuis la crise économique, à tout le moins celle en provenance des milieux indépendantistes, ne me séduit absolument pas.

    Le discours du martyre, je ne peux plus l’encaisser, surtout vu de France, où pour le coup il existe une vraie chape de plomb.

    Je pense d’ailleurs que c’est une raison pour laquelle stratégiquement, il ne nous faut pas parler de la Generalitat quand nous proposons nos idées en France autour d’une véritable prise de pouvoir locale. Nous devons rester absolument dans le domaine du raisonnable politique.

  • Vincent, le remerciement était por l´intervention nº5 (non signé, donc je ne savais pas s´il s´agissait de Gérard, Tederic ou quelqu´un d´autre)

    Je connais bien ta position. Ça fait bien longtemps que je te lis (Forum Babel, ton blog, tes interventions sur Mescladis, Le Jornalet...)

    fins aviat

  • A propos de "parler de la Generalitat", je comprends bien qu’il ne faut pas effrayer le grand public gascon, conditionné comme partout en France à voir les revendications catalanes et basques comme un repoussoir.

    Je comprends aussi que parmi nous gasconhautes, les degrés de sympathie sont divers par rapport à ces revendications, qui prospèrent sur ce qui est pour la Gascogne hors Val d’Aran une autre planète.

    Mais s’il faut faire attention à ce qu’on dit, il ne faut pas non plus s’autocensurer.
    Je souhaite que Gasconha.com parle à un vaste public, et ne vive pas sur des chimères, mais ne le vois pas comme un site conformiste ; il doit être accueillant envers ceux qui voudraient briser des tabous - ici le tabou de l’Etat-nation installé dans l’éternité !

    E tanben, ne podem pas ignorar qu’un troçòt dera Gasconha, era Vath d’Aran, ei part dera Generalitat de Catalonha.

    Et puis finalement - allez, je me lâche - dans des pays civilisés comme le Canada ou la Grande Bretagne, on sait mener des référendums qui posent la question de la souveraineté d’une région !

  • Moi qui ai vécu au Canada plusieurs années, j’ai eu la chance de voir de l’intérieur comment fonctionne un système fédéral. C’est tout simplement formidable. Je pense que la France irait beaucoup mieux si on basculait vers le fédéralisme. De plus c’est une étape indispensable vers un renouveau des cultures régionales.
    Malheureusement je suis assez pessimiste étant donné que 1) la très grande majorité de notre classe politique est farouchement jacobine 2) deux siècles de jacobinisme parisien ont ’buldozerisé’ les mentalités. Aujourd’hui 90% des français ignore ce qu’est une république fédérale. Il faudrait donc commencer par éduquer les gens et leur expliquer ce qu’est une fédération (et ce n’est pas nos gouvernants qui risque de le faire). Les plus grands pays du monde fonctionnent de la sorte : États-Unis, Canada, Allemagne, Brésil, etc. Et, tout en ayant des régionalismes bien marqués, cela n’empêche pas ces pays d’avoir une forte unité nationale !

  • A propos de la position d’Alain Juppé sur la culture gasconne,je voudrais profiter de l’occasion pour raconter une anecdote qui confirmera l’opinion de Vincent P.
    Lors d’un repas de quartier, au printemps dernier, j’ai demandé à Juppé s’il était "inquiet de la situation de la langue régionale et par ailleurs sa position sur la ratification du traité européen sur les langues régionales et minoritaires".
    Il a d’abord fait rire un peu la tablée en me répondant que ça ne l’empêchait pas de dormir, puis il a vivement affirmé qu’il était opposé à tout ce qui pouvait diviser les français et que ce traité nous mènerait à des désordres comme des demandes de traduction des actes d’état civil en telle ou telle langue et autres dérives communautaires.
    Il m’a ensuite demandé, goguenard, si moi je parlais le gascon, je lui ai simplement répondu que je manquais d’interlocuteur et je lui ait dit ma surprise puisqu’il me semblait qu’il avait chanté il y de nombreuses années, le "beth cèu de Pau" avec quelques députés du Sud Ouest : il m’a alors répondu que sa mère était bien originaire des Landes mais que son père était bordelais (ou peut être l’inverse).
    Bref j’en suis sorti avec la conviction qu’il se présenterait bien pour la présidentielle.

  • Le mia gran mair qu’èra de Campanha (40), lo vilatge de le soa mair (qu’èran de "le classa" com disèn). Qu’avè descorbèrt l’electricitat en çò de son entà le soa comunion (qu’èran los borgés deu vilatge).
    E bè, tostèm, quèn parlèvan d’eth, le mia qu’arraujèva percè n’i fotè pas jamè los pès (e sustot au segrat...). Védetz un chic com es estacat au peís, aqueth bran deu diabble...

  • La famille Juppé est originaire du Béarn, de la plaine de Nay. Toute l’ascendance de Juppé est gasconne : béarno-bigourdane coté paternel (installée à Bordeaux à la génération de son père), landaise côté maternel.

    Voir : "Le Tout Politique"

  • On trouve en ligne la généalogie du maire de Bordeaux.

    Ici : Juppé sur Geneanet

     Côté paternel, une mère célibataire Juppé de la vallée de l’Ouzoum en Béarn qui va accoucher à Maubourguet en Rivière-Basse.

    Mariage avec une Roucau (patronyme de la plaine de l’Adour, très local). Le fils naît en Algérie mais revient en Gascogne où il épouse une Dabezies (nom de l’Armagnac). Il meurt à Bordeaux.

    On ne sait pas si le père du maire de Bordeaux, Robert, fils de ce couple, est né à Bordeaux ou pas, dans tous les cas, rien que du gascon, mais certainement sociologiquement francisé par l’expérience algérienne puis l’expérience ouvrière à Bordeaux.

     Côté maternel, des Darroze de Campagne en Marsan. Généalogie totalement locale, en Marsan mais d’extraction notable, ce qui change évidemment un peu tout d’un point de vue sociologique.

    En somme, la sociabilisation identitaire d’Alain Juppé est aussi le produit de son histoire généalogique, il est issu de Gascons que le XIXème siècle a fait français, de papier mais aussi de cœur (alors que le peuple paysan restera réfractaire plus longtemps).

  • Pour revenir sur la relation à la Gascogne d’Alain Juppé, voici une interview assez intéressante, qui date de 2013 :

    Alain Juppé : « Quelques lobbies sont en train
    de nous planter »

    Cet extrait me semble intéressant :

    "Je ne suis pas Bordelais, mais je suis Gascon. J’ai été élevé à Mont-de-Marsan dans un terroir et une famille de gourmands. Mon grand-père maternel s’appelait Albert Darroze, c’était un cousin de Jean Darroze, célèbre cuisinier à Villeneuve-de-Marsan. Toute mon enfance a été ponctuée par ses repas de baptêmes, communions, mariages et enterrements. J’ai gardé des liens avec cette branche gastronomique de la famille, Francis, Claude et, bien sûr, Hélène Darroze qui est ma petite-cousine. C’est cette honorable tradition qui m’a amené au vin. Mon père venait d’un milieu tout à fait différent, extrêmement modeste, mon grand-père avait été cheminot. Il avait eu une jeunesse difficile et n’avait pas dépassé le certificat d’études. C’était un homme discret, un peu bourru, mais profondément généreux. Quand il a épousé ma mère qui avait hérité de métairies autour de Mont-de-Marsan, il s’est complètement investi dans le développement des propriétés. Il m’emmenait sur son tracteur, voir les grandes étendues des champs qu’il cultivait. Il adorait manger, buvait bien. Autour de la table familiale, ma mère servait quelques spécialités, notamment des foies gras au raisin ou aux pommes. Mon père les ramenait de la « campagne », comme il disait ou du marché de Saint-Sever. En novembre ma mère « faisait les foies »."

    Ce qui se dessine, c’est tout de même une enfance dans la familiarité du fait gascon, qu’Alain Juppé oppose à Bordeaux, non sans raison, si l’on considère l’époque moderne. Sur ce point :

    "Vu d’une petite famille landaise, Bordeaux c’était les Chartrons, aristocratie bordelaise un peu orgueilleuse, un peu méprisante, sphère inaccessible que l’on regardait avec une pointe d’envie, de jalousie. C’était un monde qui m’était inconnu sauf peut-être par les œuvres de Christine de Rivoyre. Mais Bordeaux n’est pas un monde, ce sont des mondes."

    Bref, beaucoup de clichés, bien entendu, et en arrière-plan, l’acculturation par les Grandes Écoles.

    "Pas du tout. Entre Mont-de-Marsan et Bordeaux, j’ai eu une vie parisienne, j’ai fait mes études, je me suis marié. Je revenais très souvent dans les Landes, mais là-haut, j’ai poursuivi mon initiation au vin dans des circonstances professionnelles et amicales, entouré de fins dégustateurs."


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