[Tiré des "Gasconnades" recueillies par Edouard Dulac, Editions de France, 1937]

TIRE LE CHIEN !...

- Tederic Merger

Le curé Sipière était solennel en ses propos et pompeux dans ses sermons.
Un dimanche d’août, tandis qu’il prêchait et que somnolait son auditoire, un chien, un chien de borde tirant la langue et secouant sa queue mal peignée, pénétra dans l’église ; séduit par la fraîcheur du lieu, il s’écroula sur une dalle, face à l’orateur ronronnant, et s’endormit à son tour.

Au fond, debout devant la porte entr’ouverte, le suisse, qui aurait dû arrêter l’intrus, dormait plus que tous, appuyé sur sa hallebarde pacifique.

 Enfant de l’Helvétie, cria le curé Sipière, chassez du temple du Seigneur cet emblème de la fidélité !
Mais le diable aurait pu taper sur ses casseroles d’enfer qu’il n’eût pas éveillé notre dormeur.

 Enfant de l’Helvétie... répéta le curé.

Cependant, quelques paroissiens avaient ouvert leurs paupières et vous pensez s’ils s’amusaient.

 Enfant de l’Helvétie...
Heureusement Batisto, le carillonneur, intervint :

 Suisso, macaréu, hilh de puto, vociféra-t-il, tire le chien dehors !

Un gran de sau ?

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